Les nodules thyroïdiens


 

Professeur Jean-Louis WEMEAU

 

 

La nodulation constitue d’abord un remaniement physiologique lié au vieillissement de la thyroïde. Environ 5 % des nodules cliniquement ou échographiquement découverts sont des cancers. La reconnaissance de tous les cancers n'apparaît pas pour une nécessité car beaucoup d'entre eux (micro-cancers de moins de 1 cm de diamètre) ne déterminent aucune morbidité. Enfin 10 % des nodules sont fonctionnels, captent les isotopes, et sont à risque de déterminer une hyperthyroïdie.

 

L'évaluation clinique est essentielle : il est de règle de se méfier des nodules durs, irréguliers, rapidement évolutifs, compressifs. Les nodules sont plus suspects lorsqu'ils apparaissent chez l'homme, chez l'enfant et chez le sujet âgé, après irradiation externe ou dans certaines maladies générales.

 

La TSH constitue l'examen à réaliser en premier lors de l'évaluation de tout nodule thyroïdien. Une valeur accrue fait suspecter une thyroïdite auto-immune et conduit alors seulement à la mesure des anticorps antithyropéroxydase. Une valeur basse suggère un nodule hyperfonctionnel, ce qu'authentifie l'examen scintigraphique. La calcitonine est indispensable pour tout nodule suspect et avant chirurgie. La thyroglobuline circulante ne constitue pas un marqueur diagnostique des cancers thyroïdiens localisés.

 

L'échographie couplée à l'évaluation des flux vasculaires au Doppler apporte des précisions pronostiques importantes sur le nodule et l'éventuelle dystrophie nodulaire du reste du parenchyme. Elle évalue les aires ganglionnaires. Elle est maintenant fréquemment couplée à l'élastométrie qui quantifie la dureté du nodule. Elle guide le choix des nodules qui doivent bénéficier de la ponction écho-guidée pour l'étude cytologique.

 

La cyto-ponction est contre-indiquée seulement sous anticoagulants et en cas de troubles de l'hémostase. Ses résultats sont maintenant communément présentés en six classes dites de BETHESDA qui apportent des précisions pronostiques quantifiées :

- classe 1 : cytologie ininterprétable

- classe 2 : bénin (3 % de cancers)

- classe 3 : lésion vésiculaire (5 à 15 % de cancers)

- classe 4 : tumeur folliculaire ou oncocytaire (15 à 30 % de cancers)

- classe 5 : suspect de malignité (60 à 75 % de cancers)

- classe 6 : malin (97 % de cancers)

 

Eventuellement la détection du gène BRAF aide à la reconnaissance des cancers papillaires. Cependant 15 à 30 % des cytologies restent indéterminées (classes 3,4 et 5). On voit venir avec intérêt l'avènement de tests diagnostiques appréciant l'expression de gènes permettant une meilleure distinction entre adénome et carcinome vésiculaires, avec une sensibilité de plus de 90 %.

 

Dans l'immédiat, seulement dans certaines situations ambiguës se justifient encore des scintigraphies au Technétium ou à l'Iode 123, puisque 10 % des nodules sont captants, en faveur de leur bonne différenciation. Elles peuvent être couplées à la scintigraphie au MIBI, électivement capté par les cellules en division.

 

Sont à opérer les nodules qui paraissent suspects de malignité cliniquement, échographiquement, cytologiquement, ou en raison de leur évolution (notamment d'un accroissement supérieur à 20 % par an). Dans les autres situations peut se discuter la surveillance progressivement espacée. Chez les sujets jeunes, l'hormonothérapie thyroïdienne à visée frénatrice peut être proposée, surtout dans les familles à risque pour prévenir l'évolution vers la constitution des goitres plurinodulaires.

 

 

 

Référence :

Recommandations de la Société Française d'Endocrinologie pour la prise en charge des nodules thyroïdiens. Jl Wémeau et al. Presse Med. 2011, 40 : 793-826