Dépistage auditif et visuel chez l'enfant
Le
dépistage visuel
•
Justification du dépistage
Il est
justifié de dépister les troubles visuels de l'enfant afin de prévenir
l'amblyopie
(différence d'acuité visuelle entre les yeux) car :
• Pas
de menace grave
•
Absence de plainte
Mais :
•
Prévalence élevée des facteurs amblyogènes
•
Anomalies visuelles : 14,5%
•
Strabisme : 3 à 5%, amblyogène dans 70% des cas
•
Trouble réfractif jusqu’à 20%
Amblyopie
possible avant la fin de la maturation du cortex visuel (6-7 ans)
La
prévalence de l'amblyopie en France chez l'enfant de moins de 6 ans, évaluée
sur des études de qualité discutable, varie de 0,48/1 000 pour les amblyopies
définies par une acuité visuelle inférieure ou égale à 4/10èmes à 14,5 % pour
les amblyopies définies par toute diminution de l'acuité visuelle (référence
HAS).
Compte
tenu de la prévalence des facteurs amblyogènes et de la nécessité d'identifier
une amblyopie quand elle est encore réversible, la connaissance des situations
à risque d'apparition d'un trouble visuel et des signes d'appel d'une anomalie
de la vision chez l'enfant est recommandée à tous les professionnels de santé
de la petite enfance.
Exemple local : Thèse du Dr E. DUMORTIER (mai 2013)
Etude
prospective de 645 enfants dépistés pas l’APESAL en 2009-2010 dans la métropole
lilloise
Nés
entre le 01/07/2006 et le 30/06/2010
Scolarisés
en 1ère année de maternelle en 2009/2010
2541
anomalie(s) / 27073 enfants dépistés soit 11,64%
Retentissement
sur la qualité de vie sur l’individu/répercussion sur le développement de
l’enfant dans les performances éducatives, scolaires, professionnelles
•
Difficultés de lecture (début de ligne d’un livre OG puis fin de ligne OD)
• Accès
limités à certains métiers
• Perte
de la vision binoculaire
•
Dextérité fine altérée
•
Estime de soi
•
Retentissement sur la qualité de vie sur la collectivité
• Non
immédiat mais risques liés à l’allongement de la vie : risque de cécité
bilatérale, risque d’accident
multiplié par 2 ou 3.
•
Quand adresser systématiquement ?
Les
indications évidentes
•
Grossesse, accouchement pathologique (2% des naissances) (grade C)
•
Exposition in utéro à des toxiques (alcool, tabac, drogues)
• Affections congénitales ou génétiques (1% des naissances
: anomalies chromosomiques, TORSCH : Toxoplasmose, Oreillons, Rubéole,
Syphilis, CMV, Herpès. (NB : infections durant la grossesse pouvant également
donner une surdité.)
•
Pathologies neurologiques
•
Malformations cranio-faciales
•Prématurité
(7% des naissances) (grade B)
Prématurité
modérée (32-36 SA et PDN > 1500 g) : risque augmenté de strabisme (15-20% vs
3% des NN à terme) d’amétropie (> 3,5 D, 31% vs 14% des NN à terme). Un œil
est dit amétrope dès lors que l'image nette d'un objet éloigné focalisée par
les surfaces réfractives de l'œil se forme en dehors du plan rétinien (myopie,
hypermétropie, presbytie), ou quand il n'existe aucun plan ou cette image est
nette (c'est le cas de l'astigmatisme).
Grande
prématurité (< 32 SA et PDN < 1500 g) : ROP (rétinopathie du
prématuré : La rétinopathie du
prématuré est définie comme un développement vasculaire prolifératif anormal de la rétine chez les enfants
prématurés qui ont une vascularisation incomplète de la rétine, myopie, blocage
du développement normal du segment antérieur (augmentation de la courbure
cornéenne, aplatissement de la chambre antérieure, sphéricité exagérée du
cristallin)
•Antécédents
familiaux ophtalmologiques
(15 à 20 % des naissances) (grade C)
Amblyopie
(10 % des naissances)
Strabisme
(10 à 15 % des naissances)
Forte
amétropie (anomalie de la réfraction oculaire : myopie, hypermétropie,
astigmatisme
Les
signes d’appel
• Avant
4 mois :
Tout enfant présentant une anomalie anatomique paupières,
globe, conjonctive, pupilles, strabisme fixé, nystagmus, position compensatrice
de la tête (torticolis).
Anomalie du comportement visuel : premiers réflexes
visuels
> réflexe d'attraction du regard à la lumière douce,
réflexe photo moteur, réflexe de fermeture des paupières à l'éblouissement,
présents dès la naissance
> réflexe de fixation présent à 1 mois (œil de bœuf)
> réflexe de clignement à la menace présent à 3
mois
> réflexe de maintien du parallélisme des axes visuels
présent à 3 mois (les deux yeux se dirigent de manière conjuguée et parallèle
sur l'objet à fixer)
> réflexe de poursuite présent à 4 mois (l'enfant doit
pouvoir suivre des yeux de façon durable une cible en mouvement dans le plan
vertical puis horizontal, sans avoir besoin de bouger ni la tête ni le corps)
> réflexe de convergence présent à 4 mois (quand on
fait fixer à l'enfant un objet présenté à distance de son nez et qu'on le
rapproche de lui, les axes visuels perdent leur parallélisme et les deux yeux
convergent sur l'objet de manière symétrique)
• Dès 6
mois à l’âge verbal
Si apparition d’un des signes précédemment cités
Enfant qui bute ou tombe tout le temps ou qui plisse
régulièrement des yeux. Comportements anormaux visuels comme une indifférence
aux personnes proches.
• Entre
2 et 5 ans
Si apparition d’un des signes précédemment cités
Retard d’acquisition du langage, lenteur d’exécution,
lecture trop rapprochée, gène à la vision de loin, fatigabilité à la lecture,
apparition de maux de tête, clignements réguliers des yeux, rougeurs et picotements
oculaires.
•
A quel moment faire le dépistage ?
Être systématique et reproduire les examens lors des
bilans de santé de l’enfant du carnet de santé.
1 – 4 – 9 – 24 mois
3 – 4 – 6 ans
• Bilan
8 jours – 1 mois
• Bilan
4 – 9 – 24 mois
Examen identique à celui du premier mois avec en plus :
• Bilan
3ème et 4ème année
• Bilan
6ème année
•
Comment et quels outils ?
•
Examiner à chaque examen systématique
Aspect, taille et symétrie des globes et annexes
Aspect de la pupille
Larmoiement
persistant
Ptosis de paupière
Asymétrie de taille
(ex microphtalmie)
Glaucome congénital
Colobome
Anisocorie
Corectopie
•
REFLET PUPILLAIRE
L’enfant
est assis dans les bras de sa mère et fait face au médecin. Celui-ci éclaire à
l'aide d'une source lumineuse les yeux de l'enfant, de façon médiane et à 50
cm. Normalement, le reflet cornéen est symétrique, au centre du trou noir des
pupilles. En cas de strabisme, les reflets sont excentrés.
Il
arrive que les yeux d’un enfant paraissent trop rapprochés, mais ils sont
symétriques, l’impression étant due à la base trop plate du nez du nourrisson
(épicanthus)
• TEST de L’ECRAN (COVER TEST)
On le
débute comme le test du reflet cornéen mais on interpose un écran opaque devant
chaque œil alternativement. Si les yeux ne bougent pas, le test est normal. Si
un œil se déplace lorsque l'autre est couvert, il y a strabisme.
•
LUNETTES à SECTEUR
On
observe la symétrie des yeux dans les fentes palpébrales par rapport aux caches
que l’on sait symétriques. Permettent 2 tests, d’une part, les secteurs doivent
arriver au bord de l’iris donc en cas de strabisme, soit une partie du blanc de
l’œil ne sera pas masquée (strabisme divergent) soit une partie de l’iris sera
masquée (strabisme convergent). D’autre part on peut dépister une amblyopie en
présentant à l’enfant à droite et à gauche, en cas d’amblyopie d’un œil,
l’enfant tournera la tête vers l’objet afin de le fixer avec son œil sain, c’est
le signe de la toupie.
• TEST
DE LA TOUPIE
Test
couplé au test de dépistage du strabisme lors de l’utilisation des lunettes à
secteur nasal.
• TEST
DU CACHE
L’examinateur cache tour à tour chacun des yeux (test
jumelé avec le test de l’écran).
Si l’enfant tolère que l’on cache l’un des yeux alors
qu’il le refuse sur l’autre, c’est qu’il y a
amblyopie (seul un œil lui permet de voir correctement,
l’autre est déficient.)
• TEST
DU CRAYON (test évaluant la vision stéréoscopique)
Test fait pour les enfants plus grands : il détecte les
strabismes non par une mise en
évidence de la déviation mais par une de leurs
conséquences qui est la suppression de la
vision binoculaire.
L’examinateur tient un crayon verticalement à 40 cm. Le
patient tient un crayon semblable
et doit faire coïncider le sien avec celui de
l’examinateur. Si l’enfant ne peut pas aligner les
deux crayons, il n’a pas de vision du relief (ses deux
yeux ne fonctionnent pas ensemble.
• TEST
DE LANG (évaluation de la vision stéréoscopique)
Test stéréoscopique à points aléatoires. L’enfant ne
perçoit les formes que s’il a une vision
stéréoscopique, ces formes se détachent alors du fond
Test de LANG I : étoile chat et voiture vus que si
l’enfant a une vision stéréoscopique.
Test de LANG II : l’étoile est toujours perçue, la lune,
l’éléphant et la voiture ne sont vus que
si l’enfant a une vision stéréoscopique.
Tests se pratiquant sans lunettes, par rapport à
d’autres tests avec respect de la distance de l’examen : 40 cm
Résultats du test de Lang :
Positif
: Localisation et dénomination correctes de tous les objets cachés et fixation
franche et répétée des trois éléments l’un après l’autre. Aucun examen
supplémentaire de la vision stéréoscopique n’est nécessaire.
Négatif
: Aucun élément 3D n’a été localisé. Les mouvements des yeux n’indiquent pas la
reconnaissance des éléments 3D. Les yeux parcourent le panneau rapidement et
s’en désintéressent ensuite.
Douteux
: Un seul élément caché est localisé et nommé correctement, les yeux parcourent
la plaque rapidement à la recherche d’autres objets. La vision stéréoscopique
semble gênée. Répétition du test.
•
EXAMEN DU REFLET PUPILLAIRE (Comparaison du reflet rouge/orangé du fond d’œil
entre les deux yeux)
Soit utilisation d’une lumière (ophtalmoscope) soit photo
sans utiliser le système « anti yeux rouges »
Recherche
de leucocorie : modification de la couleur qui devient blanchâtre ou
grisâtre (diagnostic à évoquer = rétinoblastome = urgence)
• LES
ECHELLES VISUELLES
1.DAVL
(désignation ou appariement) à 2 m ou PIGASSOU à 2 m 50 à partir de 3 ans :
résultat attendu 6 à 7/10.
2.SNELLEN
ou MONOYER enfant à partir de 4 ans : résultat attendu 10/10 (peut aller jusque
14/10)
3.SNELLEN
ou MONOYER à partir de 6 ans : résultat attendu 10/10 (peut aller jusque 18/10)
• TESTS
D’EVALUATION DE LA VISION DES COULEURS
1.BABYDALTON
2.ISHIARA
(idéalement à partir de 6 ans sur suivi des chemins, sur chiffres dès
l’acquisition de ceux ci)
Chaque planche est constituée d’une mosaïque de points de
couleurs différentes. Les
couleurs utilisées sont situées sur des axes de confusion
colorée prédéterminées pour
mettre en évidence une dyschromatopsie donnée
Le dépistage auditif
•
Pourquoi dépister ?
• Prévalence des
surdités sévères ou profondes : (1 à 1,5/1000 nait sourd et 1/1000 deviendra
sourd dans les 4 premières années)
• ½ environnementale,
½ génétique
• Le retentissement
du handicap dépend de la profondeur de la surdité et du retard diagnostique
• Prise en charge
précoce possible (appareillage dès 4 mois)
•
Facteurs de risque de surdité congénitale
• Facteurs de risque
familiaux
Antécédents
familiaux de surdité
Prothèse auditive
avant 50 ans
• Facteurs personnels
naissance ou période néonatale
Poids de naissance
<1500g
Prématurité surtout
< 32 SA et/ou complication cérébrale de la prématurité.
Malformation de la
tête et du cou
Troubles
neurologiques d’origine centrale
Hyperbilirubinémie
ayant nécessité exanguino-transfusion
Infection grave et
possible traitement ototoxique (aminosides)
Infection fœtale
(TORSCH)
Exposition alcool
tabac toxiques
•
Quand dépister ?
• À la maternité :
oto-émissions, potentiels évoqués, tests subjectifs
• Surveillance
couplée aux examens systématiques (identiques au dépistage visuel)
• Toujours
faire confiance aux parents : 70 % des diagnostics suite à l’observation
familiale
Durant les 8 premiers jours (dépistage de la surdité congénitale)
Bilan des 2 – 4 mois
Bilan des 9 mois
Bilan des 2 – 3 – 4 ans
Bilan de la 6ème année
•
Signes d’appel
Dans les premiers mois
Absence de réaction
aux bruits et à l’inverse réaction trop vive aux vibrations ou au toucher
Sommeil trop calme
Réflexe de
clignement au bruit (dès 2ème jour)
Réflexe de Moro à
un bruit fort (+ à 2 semaines)
De 3 à 12 mois
Sons émis non
mélodiques
Disparition du
babillage
Absence de réaction
à l’appel de son nom
De 12 à 24 mois
•
12 mois : apparition des premiers mots simples (12 à 18 mois)
•
16 mois dit papa, maman
•
24 mois possède 50 mots, fait des phrases
Absence de mots
Communication
exclusivement gestuelle de désignation
Enfant inattentif à
ce qui est en dehors de son champ visuel
Émissions vocales
incontrôlées
Après 24 mois
Retard de parole et
de langage
Troubles du
comportement (agressif, renfermé)
Difficultés
d’apprentissage
Régression,
détérioration de la parole articulée
Enfant qui fait
répéter, distrait, parle fort, augmente le son de la télévision
•
Comment dépister ?
• Examen ORL :
bouchon de cérumen, otite séromuqueuse
• Tests de dépistage
auditifs … en fait très peu de matériel à disposition !
• L’otoscope :
regarder les tympans
et savoir dépister
les otites séreuses
• Boîtes de Moatti
•
4 boîtes de fréquences différentes (étendue du champ nécessaire à la
compréhension de la parole)
•
bruit calibré de 60 dB à 2 m
•
jouet sonore agité hors du champ de vision (réaction : détournement de
la tête ou déviation des yeux vers la source sonore)
•
ne dépiste pas une surdité unilatérale
• Sensory Baby Test
L'émission des
sons, grâce aux deux boîtiers, est effectuée à droite et à gauche à une
distance de 30 cm de l'oreille.
Il est nécessaire
de placer les boîtiers hors de la vue de l'enfant car il ne faut jamais oublier
que l'enfant déficient auditif « entend » avec ses yeux. L'orientation de la
tête et du regard vers la source sonore permet d'apprécier les réponses
auditives du bébé à un seuil supérieur à 20 dB.
En cas de perte
auditive, supérieure à 20/30 dB, de transmission (rétention importante au
niveau de l'oreille moyenne) ou de perception, le nourrisson ne s'orientera pas
ou seulement de façon inconstante et aléatoire vers la source sonore.
• Audiométrie de
dépistage à 4 fréquences (500, 1000, 2000, 4000 Hz)
–bien acceptée à
partir de 4 ans et ½
–avec un appareil à
casque
–examen approfondi
si déficit > à 25 dB
–prix : environ de
650 à 1000 euros
• Les tests à la voix
nue :
A 24 mois : prénom
et mots familiers : l’examinateur placé à 40 cm de l’oreille de l’enfant, hors
de la vue appelle l’enfant par son prénom en chuchotant, sans vibration
laryngée en cachant ses lèvres. En cas de non réponse, un nouvel essai est
réalisé en élevant la voix : voix normale (60 dB) puis voix forte
A 36 mois : On peut
utiliser un imagier et demander, en chuchotant, à l’enfant de montrer le
poisson, le canard, etc... en veillant à ce que l’enfant ne puisse s’aider de
la lecture labiale. Il faut s’assurer, avant de commencer le test, que l’enfant
connaît les images proposées, même s’il ne peut encore en prononcer
correctement le nom.
Voix chuchotée à 5
m = 30 dB. À chaque fois que l’on diminue de moitié la distance on gagne 6 dB (2
m 50 = 36 dB, 1 m 25 = 42 dB), intéressant pour suivre une otite séreuse.
Tout acte médical
méritant une cotation à sa juste valeur, le dépistage auditif d’une surdité
avant 3 ans par Sensory Baby Test peut être coté de la manière suivante (CCAM):
Code :
CDRP002
Possibilité de cumuler dépistage auditif et
visuel avant 3 ans :
http://www.mgfrance.org/index.php/exercice/toute-la-nomenclature/les-majorations-enfants