Les dents de laits : diverses situations
Les dents de lait : diverses
situations.
Couleur, traumatisme, nombre,
hygiène… ce qu’elles nous disent.
Docteur Matthieu
TERNOIS 1,2,3 - Docteur Monique-Marie ROUSSET 4
2 UF de chirurgie-buccale à la Faculté de chirurgie-dentaire de Lille
3 Laboratoire de Virologie EA3610, Univ. Lille, Faculté́ de Médecine, CHU Lille
4 Ancien Professeur des Universités et référent du Département d’Odontologie pédiatrique de Lille
Colorations et
anomalies de structure
Les
colorations de la dent sont d’origines très variées. Elles se présentent
isolées ou apparaissant dans un contexte général qui oriente la recherche de
l'étiologie :
-
pathologies génétiques ou
systémiques
-
d’origines nutritionnelles ou
toxiques
-
de causes traumatiques ou
infectieuses locales
-
de simples colorations de plaque
passagères.
Les deux anomalies
génétiques les plus connues sont :
Ø l’amélogenèse imparfaite, maladie autosomale dominante,
avec dysplasie de l'émail qui se traduit par un aspect jaune brunâtre de la
dent - généralement la dentine n'est pas atteinte ;
Ø la dentinogenèse
imparfaite, maladie autosomale dominante dans laquelle les dents apparaissent
brunes ou gris bleuâtre opalescentes ; les clichés radiographiques
montrent des racines courtes et une chambre pulpaire qui n'est pas visible. En
principe l'émail
n'est pas atteint mais la coloration de la dentine apparaît par transparence.
Les
anomalies congénitales :
La porphyrie congénitale peut
provoquer une coloration verte de toutes les dents, qui s’accompagne
d’anomalies de structure à la surface de l'émail.
Le
rachitisme héréditaire, vitamino
D-dépendant, peut avoir pour conséquence des hypocalcémies
et des hypophosphatémies. La souffrance
fœtale et/ou les troubles nutritionnels ou toxiques pendant la grossesse
ont les mêmes résultats sur la formation de l'émail. Toutes ces altérations de
structures se manifestent par des colorations secondaires.
Les
anomalies acquises :
Elles résultent
essentiellement des propriétés de perméabilité de l'émail ou de la présence de
défauts de surface ou de subsurface; mais également de l'accumulation de plaque
bactérienne qui se colore secondairement. Elles seront donc :
-
Permanentes : si
la prescription de tétracyclines à l'enfant, qui provoquait l'apparition de
plages grises ou jaunes plus ou moins associées à des anomalies de structure de
l'émail, n’est plus d’actualité, on peut encore régulièrement observer des
fluoroses, conséquence d’un surdosage. Elles se traduisent par l'apparition de
taches blanchâtres et d'hypominéralisation de subsurfaces.
-
Passagères : dues essentiellement à la rétention
de substances colorées passant par la cavité buccale (médicaments, colorants
alimentaires, thé, café) qui se fixent sur la pellicule de surface ou dans la
plaque elle-même.
L’origine
peut-être également la production de composants colorés par des bactéries
chromogènes qui induisent des colorations vertes ou noires surtout au
niveau des collets des faces vestibulaires chez les enfants et adolescents.
Ces
colorations post-éruptives
peuvent être éliminées par un simple brossage ou par nettoyage au cabinet
dentaire.
Les
autres étiologies :"
Les traumatismes et
les changements microvasculaires qu'ils entraînent peuvent provoquer des
hypoplasies de l'émail.
Une
infection de la dent temporaire peut
entraîner l’apparition d’aplasies avec des plages dépourvues d'émail.
Des troubles nutritionnels et/ou toxiques pendant
la croissance peuvent provoquer également des anomalies de structure avec les
mêmes conséquences de colorations.
Les
MIH (pour syndrome d’hypominéralisation des molaires et des incisives) vont
devenir les plus fréquentes des anomalies de structure : leur prévalence
est en constante progression, comprise entre 3% et 25% selon les pays, les
régions et/ou les classes d’âge. Elles correspondent à des défauts qualitatifs
de l’émail, d’origine systémique, affectant une ou plusieurs molaires
permanentes, associées ou non à des lésions sur les incisives permanentes. Les
étiologies, plurifactorielles, sont d’autant plus difficiles à mettre en
évidence que la façon qu’a l’émail de répondre, dépend du stade de l’amélogenèse
où il se trouve au moment de l’agression et non de l’origine de celle-ci. L’état
de l’émail dépend davantage du stade de l’amélogenése au moment de son
agression que de l’origine elle-même de cette agression. C’est pourquoi les
étiologies, plurifactorielles, sont d’autant plus difficiles à mettre en
évidence.
L’exposition
au Bisphénol A est une des étiologies possibles.
Si
le diagnostic doit être confirmé par un chirurgien-dentiste, les médecins
généralistes, les pédiatres, peuvent les reconnaître, ou du moins fortement
suspecter leur présence en bouche quand ils sont face à des colorations
amélaires localisées, défauts blanc-crémeux ou jaune brun. Au départ, l’émail a
sa surface lisse et dure, mais en sub-surface il est mou et poreux. Cette
hypominéralisation le rend fragile.
Outre
le problème esthétique qu’elles posent – notamment sur les incisives – les
dents impactées par le MIH, présentent fréquemment des hypersensibilités :
le brossage, douloureux, est difficile et les lésions carieuses évoluent
d’autant plus rapidement que les dents sont fragiles. Les échecs de soins ne
sont pas rares car ces dents hypersensibles sont difficiles à anesthésier ;
ce qui accroît l’anxiété des jeunes patients. Repérer ces lésions en bouche le
plus précocement possible et adresser l’enfant à un chirurgien-dentiste permet
de préserver toutes ses chances de prise en charge.
Traumatisme de la dent temporaire et séquelles sur la dent permanente
Les étiologies des traumatismes en denture temporaire dépendent de l'âge de l'enfant :
-
Pour le très jeune enfant, l'apprentissage de la marche, le
manque de coordination dans les mouvements et la difficulté qu'il a à amortir ses chutes avec les mains, ou le
choc malencontreux contre un objet, sont source de traumatismes.
-
A l'école, c'est la cour de récréation qui est le lieu « le plus risqué ». Puis s'ajoutent les
premières leçons à vélo, rollers et autres planches à roulettes.
-
Enfin progressivement arrivent les accidents liés à la pratique d'un sport scolaire ou de
loisirs et ceux survenus sur la voie publique.
Malheureusement,
viennent s'y ajouter les traumatismes intentionnels de la maltraitance qu’il
faut tenter d’identifier.
Les conséquences de ces chocs
seront différentes suivant l'âge de l'enfant, le type de traumatisme, les dents
concernées et la rapidité de la prise en charge.
-
Chez le tout petit, les chocs et les chutes vont provoquer
des expulsions, des luxations et des déplacements dentaires.
-
Chez le jeune enfant d'âge scolaire, les fractures
coronaires seront souvent multiples dans les accidents de vélo, aggravées par
des lésions des tissus mous.
-
La pratique d’un sport aura des conséquences très
différentes suivant la direction du choc, son impact, et le type du sport
pratiqué.
Ces
risques peuvent être amplifiés par la présence de malpositions, de
malformations, ou de pathologies générales : la succion d'un doigt ou d'un
objet, le manque de résistance d'une dent cariée ou présentant une anomalie de
structure, le handicap ; autant de facteurs aggravants qui vont majorer
les risques et augmenter les tableaux cliniques.
Quelle
qu'en soit l'origine, la prise en charge doit se faire en urgence au cabinet
dentaire pour minimiser les séquelles possibles. Le chirurgien-dentiste
effectuera un examen clinique et radiologique approfondi. Et il rédigera un
certificat initial descriptif qui peut s’avérer indispensable au plan assurance
pour préserver l’avenir de l’enfant des conséquences des séquelles possibles
sur la dent permanente.
Les séquelles sur la dent permanente
Plus
l'enfant est petit, plus le risque de séquelles sera grand. A 2 ans, la dent
permanente sera touchée à plus de 50% alors que les accidents survenus entre 5
et 6 ans n'induiront des séquelles que dans 1/4 des cas.
Pourquoi des séquelles ?
La dent permanente est aux «
premières loges » s'il y a atteinte de la dent temporaire à cause de sa
proximité anatomique avec celle-ci : en effet, au niveau du bloc
incisivo-canin, le germe permanent se situe en position apicale et linguale des
dents temporaires. Quand l'enfant est très jeune, la dent temporaire n'est
séparée du germe de la dent définitive que par 1 mm de lamina dura et quand la
résorption commence il n'y a plus qu'une fine couche de matière fibreuse.
Aucun
traumatisme sur la dent temporaire n’est anodin et
l’enfant victime d’un traumatisme dentaire doit être systématiquement adressé
au chirurgien-dentiste pour une consultation.
Le germe de la dent définitive peut
être lésé, soit au moment de l'impact par atteinte directe, soit de façon
indirecte par une aggravation de l'état des tissus environnants.
-
Une lésion directe qui va se transmettre à la dent permanente
par l’intermédiaire de la dent temporaire, ou directement par le choc, peut
provoquer des colorations et dyschromies superficielles rugueuses ou des
hypoplasies de l'émail (avec perte de substance de formes diverses) et même des
dilacérations dentaires.
-
Une lésion indirecte de la dent permanente, par
l’intermédiaire d’une infection de la dent temporaire par exemple, donnera des
malformations amélo-dentinaires, des fragmentations du germe, des hypoplasies
de l'émail avec perte de substance ou des dégénérescences du germe dentaire ou
une croissance de celui-ci.
Pour
minimiser les risques d'atteinte de la dent permanente, soins et suivis sont
indispensables. Et si le soin ou le suivi sont impossibles, le
chirurgien-dentiste préférera l'avulsion car une thérapeutique inappropriée ou
incomplète entraînera un risque plus grand pour le germe que le traumatisme
lui-même.
Dans
tous les cas, la rapidité et l'efficacité de la prise en charge globale de
l'enfant, la motivation des parents et un suivi régulier permettront de limiter
– sans toutefois les supprimer totalement – les séquelles possibles du
traumatisme.
Les anomalies de nombre
Elles se présentent par excès ou par
défaut.
L’augmentation
du nombre de dents ou hyperodontie se
rencontre surtout dans les grands syndromes malformatifs et touche
principalement la denture permanente.
En denture temporaire, les dents surnuméraires
sont souvent associées aux dents natales ou néonatales (présentes à la
naissance ou apparaissant dans le mois qui suit).
2000 à 3 000 naissances sont concernées et
il s’agit majoritairement (90 % des cas) d’une éruption précoce des dents temporaires.
Mais dans 10 % des cas ce sont des dents
surnuméraires qui font leur éruption au niveau des incisives mandibulaires.
Elles sont plus souvent rencontrées chez les patients porteurs de fentes
alvéolo- palatines que chez les autres. Leur présence engendre une inflammation
gingivale et surtout pose des problèmes pour l’allaitement du bébé au sein.
Beaucoup
plus fréquentes sont les anomalies par défaut du nombre de dents.
Il y a agénésie dentaire, c’est-à-dire
absence d’un germe de dent temporaire ou permanente, quand l’odontogenèse s’est
arrêtée à un stade très précoce.
Cet arrêt concerne un nombre plus ou moins
important de dents : de l’hypodontie s’il y a agénésie de moins de 6
dents, en passant par l’oligodontie quand les agénésies touchent plus de 6
dents, jusqu’à l’anodontie où il n’existe aucun germe.
Globalement, en Europe ces agénésies ont
une fréquence d’environ 5% ; les filles sont plus atteintes que les
garçons et les dents permanentes beaucoup plus que les dents temporaires qui
présentent moins de 1% d’agénésies.
L’étiologie peut être d’origine
acquise : séquelles de traumatisme plus ou moins important au niveau de la
face, pathologie entraînant la prise de certains médicaments et/ou irradiation,
syndrome infectieux du nourrisson.
Mais le plus souvent l’étiologie est
d’origine génétique avec agénésies isolées par mutation (parfois accompagnées
d’anomalies de forme de la dent controlatérale). Ces agénésies concernent le
plus souvent les dents de « fin de séries » (groupe prémolaire, puis groupe
incisif).
Les agénésies sont
associées aussi à des fentes alvéolo-palatines et surtout aux grands syndromes
(plus de 100 syndromes présentent des agénésies dentaires dans leur tableau
clinique).
Prise en charge
La prise en charge
de ces agénésies doit être pluridisciplinaire pour accompagner la croissance,
éviter les malocclusions et préserver les fonctions.
Les thérapeutiques
existent (traitement orthodontique, prothèse amovible, etc), et doivent être
mises en place le plus précocement possible, surtout dans les cas d’anodontie
où la réhabilitation passe par des
prothèses amovibles dès l’âge de 2-3 ans. Elles favorisent le développement et
la croissance harmonieuse de la face et permettent la mise en place correcte
des fonctions de déglutition, mastication, et phonation.
Réévaluées et
changées régulièrement, elles accompagnent l’enfant jusqu’à l’âge adulte où
d’autres thérapeutiques peuvent être envisagées.
Conséquences sur l’enfant
Les
anomalies qui touchent la denture de l’enfant - altérations de teinte, de forme
ou du nombre de dents avec le plus fréquemment une insuffisance - vont avoir un
retentissement immédiat sur le développement physique de l’enfant avec
apparition possible de dysfonctions et de mauvaises habitudes d'hygiène
alimentaire et buccodentaire.
Et
ce, quelle que soit l’anomalie.
Le
développement psychologique du jeune patient n’est pas épargné car l’enfant
ressent très vite « sa différence », surtout quand l'impact esthétique est
lourd : les parents cherchent rarement à agir avant l'apparition des dents
permanentes, alors que de nombreuses solutions existent, dès la denture
temporaire.
Plus
l'enfant est pris en charge précocement, plus il aura de chances d’avoir une
croissance harmonieuse et une intégration sociale réussie.
La
prévention de la carie dentaire est un problème de santé publique et concerne
tous les professionnels de santé.
Si
l’état bucco-dentaire des enfants s’est grandement amélioré grâce aux campagnes
de prévention, 20% des enfants présentent un taux de caries élevé. La survenue
d'une pathologie carieuse dépend de plusieurs facteurs et du milieu buccal.
Quand le pH de la cavité buccale descend à 5, il y a déminéralisation des
tissus. Mais entre 6 et 5 la zone est déjà dangereuse : si l’enfant présente
une sensibilité personnelle ou s'il mange des aliments qui s'éliminent
lentement, les différentes familles de bactéries s'installent. Un pH acide et
des aliments sucrés sont les principales causes des délabrements dentaires
importants.
Les
erreurs de comportement alimentaire peuvent débuter dès les premiers mois de la
vie (biberon sucré à toute heure ou pour l’endormissement). Les pathologies
carieuses touchent très vite la denture temporaire et on observe la
« carie précoce du jeune enfant » très tôt. On a alors formation
d'une cavité qui sera colonisée par les bactéries : l’ennemi public n°1
est le streptoccoque mutans.
Si
l'activité carieuse est faible, il ne représentera qu'1% de la flore normale,
mais ce chiffre passera à 15% en cas d'activité carieuse élevée.
La
colonisation de la cavité buccale se fait le plus souvent par transmission
(cuillère que l'on goûte). Cette transmission est + fréquemment mère fille,
mais existe également en mère fils, ou père ou fratrie.
L’étiologie
peut être aussi une alimentation riche en « sucres cachés ».
Si
les bonbons sont bien identifiés comme augmentant le risque, ni l'enfant, ni
les parents ne se méfient des biscuits et gâteaux ou des boissons « aux
fruits » pris pour le goûter. De même, les céréales et les fruits secs
persistent longtemps en bouche et cette difficulté d'élimination peut les
rendre plus cariogènes qu’un bonbon qui va rapidement disparaître de la cavité
buccale.
D’autres
étiologies sont la prise de médicaments sucrés (sirop ou homéopathie) que
l’enfant va absorber juste avant l'endormissement ou l’existence d'un important
reflux gastrique non traité ou insuffisamment traité entraînant les mêmes
pathologies carieuses.
Interroger
le jeune patient sur ses habitudes alimentaires (grignotage, choix des
aliments) peut permettre de diminuer le risque carieux d'une façon importante
car il est plus difficile, même pour les parents, d'imaginer qu'il y a des
sucres dissimulés dans les biscuits salés.
Quelques
conseils simples peuvent être :
·
Boire
de l'eau (seule boisson essentielle) sans, bien entendu, y ajouter de sirop.
·
Ne
jamais terminer un repas par un yaourt (acide et sucre).
·
Manger
le fromage après le dessert (la caséine du lait diminue la déminéralisation).
·
Privilégier
la paille pour boire jus de fruits, boissons aux fruits ou coca.
Une
« bonne conduite » d'hygiène bucco-dentaire sera le corollaire indispensable
aux conseils alimentaires.
Le brossage doit
commencer avec l'apparition de la première dent : nettoyer avec une compresse
au début, puis peu à peu tous les soirs avec la brosse à dents.
Le
brossage doit être régulier, surtout le soir, à cause de la diminution du flux
salivaire la nuit. Le jeune patient doit se doter d’une brosse à dents
personnelle et adaptée à son âge, et en changer souvent ; il doit se brosser
les dents au minimum 2 fois par jour en employant une technique de brossage
adaptée à son âge.
Pour
obtenir un brossage efficace, il faut recommander la participation active des
parents jusque 3 ans. Puis, progressivement, les parents vont laisser l'enfant
acquérir son autonomie tout en surveillant le brossage qui se fera ensuite avec
et en même temps qu'eux. L’aide parentale pour le brossage du soir sera
maintenue jusqu'à environ 7 ans, ce qui permettra d'insister sur l'importance
de suivre un trajet toujours dans le même sens afin de n'oublier aucun endroit.
Il
connaît des phases de déminéralisation et de reminéralisation. Les
micro-organismes installés dans la plaque dentaire, rencontrent des glucides
fermentescibles : plus l'apport de sucres est fréquent, plus la production
acide va persister et provoquer une déminéralisation, et l'on passe de l'émail
sain à un émail carié.
Mais
si la salive en apportant du calcium et du phosphore remplit bien son rôle
tampon, et que l'on fournit du fluor sous forme topique, le phénomène est
réversible et l'émail se reminéralise.
L’allaitement
plus ou moins prolongé : oui bien sûr, mais avec certaines précautions
Les
bienfaits de l’allaitement maternel ne sont plus à démontrer. La tétée
correspond à un mouvement physiologique complexe mettant en jeu tous les
muscles de la langue, des ptérygoïdiens latéraux, des orbiculaires des lèvres
et des buccinateurs. Elle participe au développement de la respiration nasale.
La déglutition s’effectue avec la langue et la mandibule en avant. Participant
ainsi à la croissance antéro-postérieure mandibulaire, l’allaitement maternel
diminue de façon notable les risques de malocclusion et les tics de succion.
Néanmoins,
lorsque cet allaitement maternel perdure après l’apparition des premières dents
de lait, surtout si la diversification alimentaire est initiée, il importe
d’expliquer aux parents la nécessité d’un nettoyage des dents du bébé après la
tétée. En effet, les dernières études scientifiques rejoignent les constations
cliniques du quotidien et notent une recrudescence des Caries Précoces des
Jeunes Enfants (CPJE) en lien avec des allaitements prolongés et
l’endormissement du bébé au sein et a fortiori du jeune enfant.
Il
faut donc rappeler aux parents que dans le lait il y a des sucres et notamment
beaucoup de lactose qui, rapidement à 37°C, se transforme en acide lactique, et
attaque les surfaces dentaires durant toute la nuit. Les bactéries - présentes
en nombre – ont alors tout le loisir d’agir, faisant le lit d’un développement
carieux très rapide.
Pour
éviter cela, le simple passage d’une compresse humidifiée sur toute la surface
des dents de l’enfant, même endormi diminue fortement le risque carieux. Ce
nettoyage peut se faire dès l’apparition de la première dent, voire même avant.
Cette
régularité d’hygiène après la dernière tétée ou le dernier biberon deviendra
une habitude pour l’enfant avant qu’il ne s’endorme pour la nuit et permettra
l’acquis futur de bonnes habitudes.
Le
fluor
Si le risque
cariogène est élevé, il faut obtenir en priorité une modification des mauvaises
habitudes et conseiller des thérapeutiques par apport topique de fluor (dentifrice
fluoré, application de vernis fluoré ou réalisation de gouttières utilisant un
gel très fluoré). Aucune prescription fluorée ne peut se faire sans un bilan
préalable de l'apport quotidien en fluor dont bénéficie le jeune patient. Une
supplémentation en fluor nécessite aussi d’évaluer le risque carieux individuel
de l'enfant (pathologies existantes, problème génétique comme une amélogenèse
imparfaite, etc).
La mise au point de l’AFFASPS sur l’utilisation du fluor dans la
prévention de la carie dentaire avant l’âge de 18 ans, recommande :
·
de ne pas
faire de supplémentation fluorée pour les nourrissons de moins de 6 mois ;
·
ensuite, seuls
les enfants à risque carieux élevé peuvent bénéficier d’un apport fluoré par
voie systémique ;
·
tous les enfants
de 6 mois à 3 ans, à risque carieux élevé ou non, doivent bénéficier d’un brossage
avec un dentifrice fluoré (≤ 500 ppm).
L’anxiété
vis-à-vis des soins dentaires concerne toujours une partie de la population :
en France, la prévention bucco-dentaire n’est pas suffisamment intégrée et la
peur du chirurgien-dentiste, qui perdure, retarde ou compromet la pratique d’un
examen annuel. Examen pourtant conseillé pour éviter une pathologie installée.
D’autre
part, les consultations, souvent motivées par un épisode douloureux,
compliquent le premier contact du chirurgien-dentiste avec l’enfant.
L’information
et les échanges entre professionnels de santé sont donc des moyens essentiels
pour améliorer la santé bucco-dentaire et diminuer l’incidence carieuse.
L’enjeu est de les mobiliser tous dans une démarche commune et complémentaire
autour de l’enfant et de ses parents.
La
prévention doit être la plus précoce possible. Elle doit toucher les parents
dès la grossesse, période au cours de laquelle ils sont souvent plus réceptifs
aux messages dans l’intérêt de l’enfant.
Plus
tard, quand le contact s’établira directement avec l’enfant, il faudra
systématiquement y associer la famille pour pérenniser les bonnes habitudes.
En
effet, les mauvaises habitudes d’hygiène alimentaire et bucco-dentaire
entraînent surpoids et pathologies carieuses. Une alimentation saine améliore
l’état buccodentaire des enfants.
Les
enfants sont perméables aux messages positifs et à l’installation d’une
relation de confiance avec les multiples acteurs de santé qu’ils rencontrent. Cependant
les professionnels de santé doivent s’impliquer pour créer et pérenniser des
passerelles entre eux, travailler dans le même sens et disposer d’un langage
commun pour potentialiser et pérenniser l’information donnée.
Un
accompagnement plus ciblé peut alors être mis en place pour une éducation à la
santé, voire même une éducation thérapeutique pour les enfants qui souffrent
d’un diabète.
En
effet, les conséquences du diabète sur la sphère buccodentaire sont bien
connues et une démarche raisonnée de la prise en charge globale du jeune
diabétique s'accompagne impérativement d'une prévention de la maladie carieuse,
avec suppression des grignotages, limitation des apports sucrés, et lutte
contre le surpoids et l'obésité.
Le
chirurgien-dentiste ne peut, à lui seul, changer une perception insuffisante de
l'importance d'un bon état buccodentaire pour l'équilibre du diabète. Le relais
du médecin généraliste et la création des réseaux ville–hôpital permettront au
mieux ces prises en charge.
L'implication
du patient, acteur à part entière de sa propre santé, est indispensable :
l'éducation thérapeutique a montré depuis longtemps son efficacité dans le
maintien de sa qualité de vie.
Les chirurgiens-dentistes sont partie prenante dans la prévention de l’obésité et du diabète. Et certains, à l'hôpital comme à la ville, se forment maintenant spécifiquement à l'ETP pour aider l’enfant à garder la bonne santé buccodentaire qui contribuera à l’équilibre de son diabète.
Ce qu’il faut retenir
Agir sur le risque en :
-Évitant la prescription de fluor chez le nourrisson les 6 premiers mois de la vie
-En rappelant les bonnes règles d’hygiène alimentaire et bucco-dentaire
-Encourageant les contrôles réguliers chez le chirurgien-dentiste
Se souvenir :
-Qu’aucun traumatisme sur dent temporaire n’est anodin et qu’il faut adresser systématiquement l’enfant au chirurgien-dentiste en cas de traumatisme, même léger
-Que les dents temporaires se soignent et qu’une dent infectée peut avoir de lourdes conséquences sur la denture permanente
-Qu’il faut participer au dépistage des MIH et réagir en adressant précocement au chirurgien-dentiste l’enfant porteur de colorations et/ou de pertes de structures sur les dents permanentes
-Que l’allaitement prolongé peut comporter des risques de carie précoce du jeune enfant et qu’il est indispensable de nettoyer les surfaces dentaires après la dernière tétée du soir.
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