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Les violences conjugales.
« VIOLENCE CONJUGALE : SITUATIONS MÉCONNUES, CHIFFRES ALARMANTS »
Sandrine BALLONET
Référente départementale violences conjugales – arrondissement de Lille
Association Louise Michel
Sandrine BALLONET
Référente départementale violences conjugales – arrondissement de Lille
Association Louise Michel
Non, la violence conjugale n’est pas une dispute qui tourne mal !
Elle revêt bien plus de complexité qu’il n’y paraît, parce qu’elle se déroule dans le huis-clos familial et parce qu’elle se répète de façon cyclique.
Elle n’est pas l’apanage d’une catégorie sociale mais est présente dans tous les strates de la société, indifféremment de l’âge ou de la culture.
L’enjeu de la violence conjugale est la domination d’un partenaire sur l’autre (souvent d’un homme sur une femme) et la mise sous emprise de l’autre (le conditionnement).
Il faut priver la victime de toute autonomie et la convaincre de ses incapacités et de son infériorité.
La violence conjugale « piège » sa victime.
En France, 1 femme meurt tous les 3 jours sous les coups de son conjoint ou ex-conjoint et 1 homme tous les 14 jours en moyenne.
Il est inconcevable que le foyer puisse devenir pour ces victimes le lieu de tous les dangers.
En 2015, 256 décès sont liés directement à la violence au sein du couple : 122 femmes tuées dont 115 au sein d’un couple officiel,
- 22 hommes tués (dont 8 étaient auteurs de violences)
- 36 enfants tués dans le cadre des violences au sein du couple parental
- 26 victimes collatérales et rivaux.
Pour l’ensemble de ces affaires, 56 auteur-e-s se sont suicidé-e-s.
La violence conjugale est une atteinte volontaire à l’intégrité physique ou psychique de la personne et constitue un délit puni par loi, quelque soit l’incapacité totale de travail.
Elle est passible de 3 à 5 ans d’emprisonnement et de 45000 à 75 000€ d’amende.
Méconnaître ses mécanismes, c’est assurément ne pas apporter la réponse adaptée.
CONFLIT ET VIOLENCE CONJUGALE :
La distinction est essentielle et déterminante pour la posture à adopter face aux victimes.
La prise en charge sera complètement différente selon que l’on se trouve en présence d’un conflit ou en présence d’une situation de violence conjugale.
Dans le cadre du conflit, les partenaires peuvent s’exprimer librement, chacun argumente :
c’est une relation égalitaire dans le couple.
La résolution du conflit peut éventuellement passer par le recours à une médiation.
Dans le cadre de la violence conjugale, il n’existe pas de symétrie dans les relations de couple.
L’un des partenaires exerce sa domination, son emprise sur l’autre.
C’est une relation inégalitaire où la victime est niée dans son intégrité : il n’y a pas d’altérité.
Le partenaire victime est toujours le même et tenter de résoudre la violence par la médiation reviendrait à mettre en danger la victime et à renforcer le pouvoir de l’agresseur.
TYPES DE VIOLENCES CONJUGALES :
Violences verbales: insultes, menaces, chantages…
Violences psychologiques: dénigrement, contrôle, humiliations, mépris…
Violences physiques: coups, brutalités, gifles, strangulation, séquestration, …
Violences sexuelles: relations sexuelles imposées par menaces ou contraintes, viols, prostitution forcée…
Violences économiques: privation des moyens de paiement, confiscation des documents administratifs nécessaires à la vie courante, contrôle des dépenses, interdiction de travailler…
CYCLE DE LA VIOLENCE CONJUGALE :
La violence conjugale se développe à travers des cycles qui varient en fréquence et en intensité.
Ce processus permet à l’auteur de renforcer son emprise et sa domination.
Dans la phase de tension : l’agresseur installe par son comportement un climat de tension
dans couple. Tout prétexte devient source de tension.
La victime tente désespérément de contrôler la situation en essayant de satisfaire les exigences de son agresseur.
La victime est stressée, anxieuse.
Dans la phase d’agression : l’agresseur va passer à l’acte : violences psychologiques, verbales et/ou physiques : la violence éclate et l’auteur semble « perdre le contrôle ».
La victime est anéantie.
Dans la phase de transfert de responsabilité/ inversion de culpabilité : l’auteur des violences utilise l’élément déclencheur pour valider sa violence et minimiser sa propre responsabilité.
Il justifie son agression en impliquant la «faute» supposée de la victime.
Elle devient ainsi responsable des violences subies et se sent coupable des gestes posés à
son endroit.
Elle est persuadée que si elle change, les violences cesseront. Elle minimise les faits parfois jusqu’à nier sa souffrance.
Dans la phase de lune de miel/ rémission : après la crise, l’agresseur peut s’excuser et redevenir « comme avant » par crainte de perdre sa compagne. Il promet de ne plus recommencer, de se soigner etc...
La victime se remet à espérer, elle pardonne et croit qu’il peut changer.
Elle refusera toute démarche qui pourrait faire évoluer la situation.
La compréhension du cycle des violences permet au professionnel d’adapter son intervention en fonction de la phase dans laquelle se situe la victime.
De même, il est important de respecter les choix et le rythme de la victime de violences conjugales.
CONSÉQUENCES SUR LA SANTÉ :
La violence conjugale a des conséquences non négligeables sur la santé des femmes.
On constate une augmentation:
du nombre d’hospitalisations,
des états dépressifs, d’anxiété,
des troubles de l’alimentation et du sommeil,
des dépendances à l’alcool, au tabac et aux drogues,
des états de stress post traumatiques,
des tentatives de suicide,
des troubles douloureux divers et inexpliqués,
des troubles psychosomatiques
une aggravation des pathologies chroniques
…
La grossesse ou l’annonce de celle-ci sont souvent un facteur déclenchant des violences conjugales.
On constate souvent une aggravation de ces dernières pendant la grossesse.
La vigilance du professionnel de santé est donc essentielle pour repérer les signes d’alerte.
Elle est fondée sur la relation de confiance entre le praticien et sa patiente.
CONSÉQUENCES SUR LES ENFANTS :
L’enfant exposé aux violences conjugales est une victime à part entière.
La violence dont l’enfant est témoin a les mêmes répercussions que s’il en était la victime directe.
En 2015, 36 enfants ont été tués dans le cadre des violences au sein d’un couple parental.
68 ont assisté à l’homicide de l’un de leur parent et 96 enfants sont devenus orphelins.
POURQUOI RESTENT ELLES ?
Par peur ou terreur, par espoir que les choses changent, par perte de l’estime de soi, par gêne, par honte ou pression de l’entourage, par peur des conséquences du départ, par amour ou loyauté, parce que la violence fait partie de leur vie …
Famille, amis… compréhensifs et présents au début, peuvent se détourner de la victime au fur et à mesure des crises par incompréhension et méconnaissance des mécanismes des violences conjugales.
Manque de soutien, de compréhension et d’écoute...y compris de la part des professionnels !
Rappelons enfin que les violences conjugales sont souvent exacerbées au moment de la séparation et ce, parfois jusqu’au passage à l’acte létal.
POURQUOI RESTENT ELLES ?
Par peur ou terreur, par espoir que les choses changent, par perte de l’estime de soi, par gêne, par honte ou pression de l’entourage, par peur des conséquences du départ, par amour ou loyauté, parce que la violence fait partie de leur vie …
Famille, amis… compréhensifs et présents au début, peuvent se détourner de la victime au fur et à mesure des crises par incompréhension et méconnaissance des mécanismes des violences conjugales.
Manque de soutien, de compréhension et d’écoute...y compris de la part des professionnels !
Rappelons enfin que les violences conjugales sont souvent exacerbées au moment de la séparation et ce, parfois jusqu’au passage à l’acte létal.
LE CADRE LÉGISLATIF :
La violence conjugale est un délit relevant du tribunal correctionnel quelle que soit l’I.T.T.
circonstance aggravante depuis 1994
Loi du 26 mai 2004 sur le divorce (référé violences, abrogé en 2010) Loi du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales (éviction pénale des auteurs)
Loi du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des
violences au sein du couple ou commises contre les mineurs (élargissement des cat. d’auteurs: PACS, concubin et qualité d’ex.)
Loi du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux
femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants: instaure notamment l’ordonnance de protection des victimes. Loi du 4 août 2014 relative à l’égalité réelle entre les femmes et les hommes
Loi du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfant
SECRET MÉDICAL ET SIGNALEMENT
Le secret professionnel s’impose à tout médecin dans les conditions établies par la loi. Art. 4127-4 du CSP
Il existe de dérogations légales au secret médical : art.226-14 du code pénal
Dans le cas de violences exercées sur un mineur ou une personne vulnérable ou de violences conjugales avec un péril imminent, la loi autorise le médecin à dénoncer ces violences sans l’accord de la victime.
Le signalement concerne les situations graves nécessitant une protection judicaire sans délai.
Le médecin bénéficie d’une protection disciplinaire, civile et pénale, s’il signale ou informe uniquement les faits et ce qu’il a constaté « en toute bonne foi ».
Toute décision doit être prise dans l’intérêt du patient.
Concernant les majeurs, la décision doit se prendre après évaluation de la situation, du « péril imminent », et de la vulnérabilité.
Art. 222-8 du code pénal : « …sur une personne dont la particulière vulnérabilité , due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse , est apparente ou connue de son auteur… »
L’information préoccupante concerne les mineurs en danger ou en risque de l’être.
Elle est transmise à la cellule départementale pour alerter le Président du Conseil départemental sur l’existence d’un danger ou risque de danger pour un mineur.
Art. R. 226-2-2 du code de l’action sociale et des familles,
Art 43 du code de déontologie médicale,
Art R. 4127-43 du code de la santé publique.
LE RÔLE DES PROFESSIONNELS DE SANTÉ :
Le repérage précoce et l’anticipation permettent de prévenir la dégradation de la santé de la femme.
La violence conjugale laisse toujours des traces physiques et/ou symptomatiques : coups, blessures, fractures états dépressifs, douleurs chroniques parfois inexpliquées etc…
Quel que soit le motif de consultation, le professionnel de santé peut intervenir au stade du repérage et/ou de la prise en charge de la victime.
Repérer la violence, c’est poser des questions
Nommer la violence, c’est rappeler l’interdit
Déculpabiliser la personne, elle n’est pas responsable
Ne pas juger
Il faut poser la question de la violence, au même titre que celle sur les usages en matière de
tabac ou d’alcool.
L’essentiel est d’être à l’aise avec la question et de connaître ses limites.
Le professionnel de santé doit se constituer un réseau lui permettant de ne pas « s’épuiser»
face à des situations complexes. Il peut orienter vers :
les structures et associations spécialisées,
les référents départementaux violences conjugales,
le 3919,
les services du département,
les référents nommés au sein des professions de santé
…/…
LA RÉFERENTE DÉPARTEMENTALE VIOLENCES CONJUGALES : ARRONDISSEMENT DE LILLE
La nomination des référentes départementales violences conjugales par la préfecture de Lille s’est inscrite dans le cadre de la mise en place du 2ème plan global et interministériel de lutte contre les violences faites aux femmes (2008-2010), reconduite depuis par les plans successifs.
La référente départementale violences conjugales -arrondissement de Lille- assure depuis 2009, une mission de coordination de proximité pour permettre une prise en charge globale et dans la durée des femmes victimes de violences conjugales. Le but est de favoriser le retour à l’autonomie de ces dernières.
C’est une intervention à 2 niveaux :
*Autour de la victime en évaluant la situation de chaque femme, ses besoins, tout en respectant ses choix et son rythme, et en favorisant son autonomie.
*Et dans un réseau d’acteurs locaux :
=> Par une connaissance des professionnels existants sur son territoire, afin de les mobiliser chaque fois que nécessaire ;
=> Par des actions de sensibilisation et/ou formation du grand public et des professionnels à la problématique des violences conjugales.
La référente départementale violences conjugales- arrondissement de Lille - est souvent sollicitée par des partenaires ou
professionnels pour un avis sur situation et/ou un accompagnement. Mais elle est également repérée et sollicitée pour des actions de sensibilisations et/ou formations des professionnels.
C’est aussi une implication dans les différents réseaux institutionnels ou non de lutte contre les violences conjugales de la métropole lilloise dont Armentières, Hem, Lille, Roubaix, Seclin, Tourcoing, Villeneuve d’Ascq … ainsi qu’une participation à la Commission Départementale de Prévention et de Lutte contre les Violences faites aux Femmes et aux différents travaux y afférents.
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POUR ALLER PLUS LOIN …
=> Enquête ENVEFF 2000
=> Rapport HENRION 2001
=> Rapport N.SEVERAC « Les enfants exposés à la violence conjugale : recherches et pratiques » ONED 2012
=> Rapport « Les femmes victimes de violences conjugales, le rôle des professionnels de santé » 2015 La documentation française
=> OMS «Comprendre et lutter contre la violence à l’égard des femmes »
=> MIPROF « la lettre de l’observatoire nationale des violences faites aux femmes » n°6 – mars 2015
=> Edouard DURAND : « violences conjugales et parentalité, protéger la mère c’est protéger l’enfant »
=> Karen SADLIER : « Violences conjugales un défi pour la parentalité »
=> Marie- France HIRIGOYEN : « Femmes sous emprise »
=> Liliane DALIGAND « Violences conjugales en guise d’amour »
=> Murielle SALMONA « Psycho traumatismes » Mémoire traumatique et victimologie.
=> www.stop-violences-femmes.gouv.fr