Les hypercholestérolémies
Formathon 2015 : Les hypercholestérolémies
Dr Matthieu Calafiore – Spécialiste en Médecine Générale – Maître de conférences associé à la faculté de médecine de Lille 2
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L’utilisation des statines en médecine générale est une pratique courante.
Toutefois, les récentes publications du Pr Even et Debré (La vérité sur le Cholestérol – Broché), des recommandations françaises (1) sur leur utilisation datant de 2010, des avis contradictoires des sociétés de cardiologie(2), et la récente mise sous demande d’accord préalable de certaines molécules en France(3), compliquent la tâche le prescripteur devant un patient souffrant d’hypercholestérolémie.
Il convient dès lors de revoir les indications de ces traitements en fonction des antécédents et du niveau de prévention recherché, puis de s’interroger sur l’efficacité des différentes molécules présentes sur le marché, pour enfin retenir un message clair pour la pratique courante.
Les indications dans les différents types de prévention
Il existe plusieurs types d’échelles ou de score permettant d’orienter la prescription des traitements en cas d’hypercholestérolémie.
Les sociétés américaines recommandent l’utilisation d’un score de risque prédit par l’équation PCRA (Pooled Cohort Risk Assessment).
Les deux autres principales échelles sont celles de Framingham et l’échelle SCORE.
L’échelle de Framingham a fait l’objet de nombreuses évaluations. Elle évalue essentiellement la mortalité et le risque d’accidents cardio-vasculaires, mais surestime le risque d’infarctus du myocarde mortel chez l’homme.
SCORE est issu d’une méta-analyse européenne, évaluant la mortalité cardio-vasculaire et devrait être préférée en France(4)
La notion de seuil de LDL-c à atteindre est elle-même remise en question et il est de plus en plus admis de cibler un risque cardio-vasculaire plutôt qu’un seuil de LDL-c(5)
Toutefois, les hypocholestérolémiants n’ont pas d’effets favorables chez tous les patients. Par exemple, l’insuffisance cardiaque sévère et l’insuffisance rénale terminale représentent deux pathologies où les statines n’ont pas d’effet favorable.
Dans les autres cas, les hypocholestérolémiants, et notamment les statines, peuvent avoir un effet bénéfique qu’il convient de mettre en balance avec les effets iatrogènes : douleurs musculaires, myocytolyses réversibles ou non, risque accru de diabète(6)
En prévention primaire, c'est-à-dire sans antécédent clinique cardio-vasculaire et sans diabète, une évaluation des risques doit être réalisée, mais la faible diminution de morbi-mortalité doit être mise en relation avec une prévalence non négligeable d’effets indésirables iatrogènes. Il n’existe pas de recommandation de traitement par statine chez les patients en prévention primaire de plus de 75 ans.
En prévention secondaire et tertiaire, l’objectif sera de prescrire une statine, parmi celles ayant fait la preuve d’une diminution de morbi-mortalité.
L’efficacité des hypocholestérolémiants
Tous les traitements existants ont un impact plus ou moins prononcé sur le cholestérol et notamment le LDL-c mais tous n’ont pas fait la preuve de leur efficacité en termes de morbi-mortalité.
Les Fibrates n’ont pas fait la preuve d’une efficacité sur la mortalité globale et présentent un profil d’effets indésirables conséquent. Elles sont donc à éviter.(7)
Parmi les statines, seules la simvastatine et la pravastatine ont fait preuve de leur efficacité. L’atorvastatine a fait la preuve d’une légère diminution des évènements cardio-vasculaires comparativement à la pravastatine, mais au prix d’effets iatrogènes musculaires et hépatiques plus importants (8)
La rosuvastatine n’a pas démontré clairement son efficacité en termes de morbi-mortalité comparativement aux statines de référence, mais semble exposer à un risque accru de diabète et d’effets indésirables musculaires et rénaux (7)
La prescription d’ezetimibe, seule ou associée à une statine, n’a aucun intérêt clinique clairement établi. Elle expose par contre à une augmentation des effets indésirables musculaires. Un effet cancérogène est en outre suspecté pour cette molécule(7)
Que retenir pour la pratique courante ?
En prévention primaire seule et à fortiori chez le patient de plus de 75 ans : Pas de traitement
En prévention secondaire ou tertiaire :
- • Les fibrates ne doivent pas être prescrites compte tenu de leur rapport bénéfice/risque extrêmement défavorable
- • La prescription d’une statine est impérative, sauf contre-indication, pour diminuer la morbi-mortalité, et sauf en cas d’insuffisance cardiaque sévère et d’insuffisance rénale terminale
- • La prescription d’une statine devra se porter préférentiellement sur la pravastatine ou la simvastatine. L’atorvastatine peut être utilisée mais présente un profil d’effet indésirables iatrogènes plus défavorable.
- • Il n’existe aucune donnée actuelle devant faire privilégier la rosuvastatine en termes de rapports bénéfice/risques.
- • Aucun dosage de LDL-c n’est nécessaire, sauf en cas de doute sur l’observance
- • Aucune cible de LDL-c n’est recommandée
- • Il n’existe aucun intérêt à prescrire l’ezetimibe
1. 5_ Synthèse du rapport_MAJ sept 2010 - synthese_efficacite_et_efficience_des_hypolipemiants_-_une_analyse_centree_sur_les_statines.pdf [Internet]. [cité 21 févr 2015]. Disponible sur: http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2010-07/synthese_efficacite_et_efficience_des_hypolipemiants_-_une_analyse_centree_sur_les_statines.pdf
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pages web HAS s'y référant :
http://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_1360516/fr/pour-un-bon-usage-des-statines
Par sécurité vous trouverez en toute fin de cet article, un lien de téléchargement direct du document HAS
2. American College of Cardiology Foundation | Journal of the American College of Cardiology | 2013 ACC/AHA Guideline on the Treatment of Blood Cholesterol to Reduce Atherosclerotic Cardiovascular Risk in AdultsA Report of the American College of Cardiology/American Heart Association Task Force on Practice Guidelines [Internet]. [cité 21 févr 2015]. Disponible sur: http://content.onlinejacc.org/article.aspx?articleid=1879710
3. ameli.fr - Accord préalable et hypocholestérolémiants [Internet]. [cité 21 févr 2015]. Disponible sur: http://www.ameli.fr/professionnels-de-sante/medecins/exercer-au-quotidien/formalites/l-accord-prealable/accord-prealable-et-hypocholesterolemiants.php
4. Marchant I, Boissel J-P, Kassaï B, Bejan T, Massol J, Vidal C, et al. SCORE should be preferred to Framingham to predict cardiovascular death in French population: Eur J Cardiovasc Prev Rehabil. oct 2009;16(5):609‑15.
5. Krumholz HM. Target cardiovascular risk rather than cholesterol concentration. BMJ. 27 nov 2013;347(nov27 1):f7110‑f7110.
6. Swerdlow DI, Preiss D, Kuchenbaecker KB, Holmes MV, Engmann JEL, Shah T, et al. HMG-coenzyme A reductase inhibition, type 2 diabetes, and bodyweight: evidence from genetic analysis and randomised trials. The Lancet. janv 2015;385(9965):351‑61.
7. Prescrire. Hypercholestérolémies : traitements chez les adultes. Avril 2014. (366).
8. Prescrire. Choix d’une statine : Pravastatine et simvastatine mieux éprouvées que l’atorvastatine. Octobre 2006. 26(276):692‑5.
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