Allergies alimentaires chez l'enfant
Anne-Christine VILAIN
Diététicienne
Hôpital Saint Vincent de Paul
Unité d’allergologie
Boulevard de Belfort
BP 387
59020 LILLE Cedex
Sur le plan épidémiologique : 8% des enfants présentent des allergies (soit 2 à 3 par classe !!)
A.Manifestations cliniques :
Apparition rapide (dans les 20 mn), parfois lente (24 à 48 h), après ingestion, également par contact ou inhalation
Réactions cutanées : eczéma, urticaire, érythème
Réactions ORL : rhinite
Réactions digestives : diarrhée, vomissements
Réactions muqueuses : œdème
Réactions respiratoires : asthme
Réactions généralisées : choc anaphylactique
B.Les principaux allergènes alimentaires chez l’enfant :
Œuf
Arachide
Lait de vache
Fruits à coque
Poissons
Crustacés..
5 aliments sont responsables de 75% des allergies alimentaires chez l’enfant. Les allergies sont essentiellement d’origine animale et diminuent avec l’âge.
C.L’interrogatoire
Histoire clinique (convaincante ou non), les antécédents, la voie de déclenchement, le délai de survenue, l’analyse des signes, la recherche de l’aliment en cause (emballage des aliments avec composition et quantité d’allergène)
D.Les tests cutanés : Prick-tests Patch-tests
Arrêt des antihistaminiques 5 jours avant les tests, excellent valeur prédictif du test natif (réalisé à partir des vrais aliments)
Un test cutané positif = sensibilisation ( d’une allergie)
E.La biologie
- Tests de dépistage ou tests d’orientation diagnostique (Trophatop®) et les mélanges d’aliments (fx5, fx24..) : peu d’intérêt pour le diagnostic en cas de polysensibilisation ou si dermatite atopique. Permettent de recouper dans le quotidien les réactions cliniques par rapport aux résultats.
- Dosage des IgE totales dans certains cas avec rapport IgE spécifiques /IgE totales
- Dosage des IgE spécifiques (selon les Prick tests, utile, mais a ses limites : IgE spécifiques noisette > 100 chez un patient consommant du Nutella® chaque matin)
- Les allergènes recombinants : ce sont des molécules de synthèse produites par des techniques de biotechnologie permettant d’identifier puis de reproduire des protéines déterminées d’un extrait allergénique.
Ils permettent de mieux comprendre les réactivités croisées (par exemple entre la noisette et les pollens)
Exemple pour l’arachide :
– rAra h 8 (fausse allergie alimentaire, allergie croisée pollen)
– rAra h 2 (marqueur d’allergie vraie)
– rAra h 1 (facteur de gravité si rAra h 2 est positif)
– rAra h 3 (facteur de gravité si rAra h 2 est positif)
E.Les tests de provocation
Le test de provocation labial (TPL) est défini comme un test de contact de l'aliment avec la muqueuse labiale, dans le but de reproduire des manifestations cutanées locales, et d'éviter les réactions systémiques. Il s'agit d'une expression locale de la réponse IgE à un antigène. Ce test peut être effectué à l'aide d'un extrait alimentaire commercial, ou en utilisant l'aliment frais.
Stade 1: Déplissement de la lèvre inférieure
Stade 2: Erythème sous la lèvre
Stade 3: Urticaire de contiguïté de la joue et du menton
Stade 4: Œdème de la lèvre avec rhinite et larmoiement
Stade 5: Réaction systémique associée à un prurit sur les zones d'eczéma et à une toux.
Le test de provocation oral (TPO)
La place du test de provocation par voie orale est capitale en Allergologie alimentaire. Il reproduit l'histoire clinique en respectant le temps, la quantité des aliments et les symptômes
F.Les régimes d’éviction
Part rapport au seuil de réactivité
Qualité de vie
• Éviction : risque de carence, manque de plaisir, alimentation peu diversifiée, poids de la famille
• Problème dans la vie sociale: repas à l’extérieur
• Mise à l’écart
Risque d’aggravation par un régime strict
Mise en place de protocoles de tolérance
Adaptation de l’éviction
Après le diagnostic :
• Mise en place du/des régime(s) d’éviction = bouleversement :
- Remise en question des habitudes alimentaires et culinaires,
- Impact sur la qualité de vie (choix, risque),
- Réfléchir avant d’acheter et avant de manger,
- À l’extérieur aussi (restaurant, cantine, centre aéré…).
Intérêt d’un bon diagnostic :
• Avoir des informations précises sur les allergènes en cause et le degré d’éviction :
- Arachide : huile d’arachide ?
- Soja : huile, lécithine ?
- Œuf : cru, cuit, lysozyme ?
- Traces ?
- Allergies croisées ?
- Pas d’éviction inutile
Les pièges :
ü De l’œuf dans du fromage,
ü Du poisson dans de la margarine,
ü Du lait dans du saumon fumé,
ü De l’œuf, du poisson et du lait dans du vin et du cidre…
G.Evolution naturelle des allergies
Pour les allergies au lait :
55 % des APLV persistent au-delà d’1 an,
90 % de guérison avant 10 ans (Rancé, 2004),
Âge moyen de l’acquisition de tolérance : 3 ans.
• Les formes non IgE-médiées :
Ø Guérison plus rapide et plus fréquente avec 100 % de guérison à 5 ans (Saarinen, JACI 2005).
• Les formes IgE-médiées :
Ø Tolérance spontanée chez 74 % à 5 ans, chez 85 % à 8 ans.
• Allergie persistante : protocole de désensibilisation
Pour les allergies à l’arachide :
Moins de 10% évoluent vers une guérison spontanée
Pour les allergies à l’œuf :
Guérison spontanée fréquente après 6 ans
En conclusion :
Une sensibilisation n’est pas une allergie : trop de diagnostics d’allergies vraies sont posés sans preuve réelle.
Attention aux régimes d’éviction stricts : …….
Les protocoles de tolérances sont des niveaux seuils à définir et à modifier pour améliorer la tolérance des allergènes (on en définit une quantité à ingérer en cas de non guérison)