Coeur et médecine
Selon les données de l'organisme statistique européen EUROSTAT, les maladies cardio-vasculaires restent responsables de 43 % des décès chez l'homme et de 54 % des décès chez la femme. En 2009, Eurostat a recensé dans l'Union Européenne 2.410.000 décès dont 38 % étaient imputables aux maladies cardio-vasculaires.
Au cours de la dernière décennie on a observé, du moins dans les pays occidentaux industrialisés, un déclin de la morbi-mortalité cardio-vasculaire. Ceci est essentiellement lié à des progrès substantiels dans le domaine des traitements pharmacologiques, des interventions (chirurgie et technique interventionnelles non chirurgicales) ainsi que dans la prévention secondaire. Il faut aussi souligner l’impact des recommandations européennes dans les divers domaines de la cardiologie.
La stratégie thérapeutique des syndromes coronaires aigus est bien établie: Dominée par l’angioplastie primaire, celle-ci implique une logistique précise. Cette prise en charge de l’infarctus s’est accompagnée d’une amélioration considérable du pronostic : 5 à 6% de mortalité à la phase aiguë contre 25-30% il y a 20 ans.
Dans la maladie coronaire stable, les indications respectives de l’angioplastie et de la chirurgie coronaire sont bien codifiées.
Les affections valvulaires sont dominées par le rétrécissement aortique calcifié du sujet âgé pour lequel, à côté de la chirurgie se met en place une stratégie d’implantation de valve par voie percutanée, qui sera dans peu de temps le traitement principal. Une évolution semblable se précise pour l’insuffisance mitrale.
Avec le vieillissement de la population, les cardiologues sont de plus en plus confrontés à l’arythmie complète par fibrillation auriculaire : Un espoir est né avec la dronedarone susceptible de remplacer la cordarone mais si l’efficacité est au rendez-vous, quelques cas d’accidents hépatiques graves risquent de compromettre sérieusement la carrière de ce nouveau médicament.
L’ablation des circuits anormaux tournant autour des veines pulmonaires est attrayante mais difficile et de plus elle perd son efficacité avec le temps. La principale complication de la fibrillation auriculaire étant l‘embolie cérébrale, le traitement par les anti-vitamines K était indispensable mais source de multiples aléas liés à l’instabilité de ces anticoagulants avec des INR flottants, trop dépendants de la compliance des malades et de leur régime alimentaire. Les AVK vont céder la place à de nouveaux anticoagulants, inhibiteur direct de la thrombine (dabigatran) ou inhibiteur du facteur Xa (apixaban, rivaroxaban) plus efficaces que les AVK, plus sûrs et surtout plus stables et ne nécessitant pas de monitoring.
L’insuffisance cardiaque, aboutissant terminal de toute cardiopathie, a bénéficié de réels progrès avec la resynchronisation ainsi que d’un médicament récent l’ivabradine diminuant la mortalité et réduisant les ré hospitalisations. Enfin les cardiopathies congénitales, avec les méthodes non invasives, survivent plus longtemps et les pédiatres s’occupent maintenant plus de cardiaques adultes que de cardiopathies de l’enfance.
Ces différentes avancées majeures seront rappelées au cours de la conférence qui se terminera par une ébauche de prédiction concernant l'évolution des maladies cardio-vasculaires au cours de la prochaine décennie.
En effet, on prévoit une ré-ascension de la morbi-mortalité cardiovasculaire et aussi peut être un changement du paysage cardiologique. Ceci résulte de 3 phénomènes: (1) La prévention secondaire est au point, les médicaments sont prescrits mais encore trop de patients n’ont pas atteint les objectifs fixés pour la TA, le LDL cholestérol et la suppression du tabagisme. (2) l’obésité est devenue un véritable fléau responsable d’une explosion des cas de diabète de type 2 générateurs de complications macrovasculaires athéroscléreuses et microvasculaires (rétinopathie, néphropathie). (3) Enfin l’allongement de l’espérance de vie va faire exploser le nombre de cas d’arythmie complète responsables d’AVC ischémiques par embolisation. On pourrait ainsi voir un transfert déjà perceptible dans certains pays avec moins d’infarctus du myocarde mais plus d’AVC.
Tout ceci pourrait être inquiétant mais quand on songe aux immenses progrès accomplis en cardiologie au cours des dernières années, on peut rester confiants pour l’avenir.