Eruptions cutanées
Pr Philippe MODIANO
Les éruptions cutanées sont un motif fréquent de consultation en médecine générale, plusieurs termes sont employés pour les désigner : exanthème maculopapuleux, érythème généralisé ou Rash. Elles surviennent dans un contexte aigu.
L’analyse sémiologique fine, pour permettre de faire un diagnostic précis, ainsi que la recherche de signes de gravité pour discuter d’une Hospitalisation doit être primordiale dans la prise en charge d’une éruption cutanée par le médecin généraliste.
On distingue selon leur importance :
· L’exanthème morbilliforme, maculopapuleux rouge pouvant confluer en plaques séparées par des espaces de peau saine, avec une surface douce, veloutée à la palpation.
· L’exanthème scarlatiniforme, en plaques diffuses, rouge vif, légèrement granité à la palpation, sans intervalle de peau saine, chaud ou cuisant, s’intensifiant dans les plis pouvant évoluer vers une desquamation secondaire, en large ou en long.
· L’exanthème roséoliforme ou rubéoliforme formé de petites macules rosées, pales, bien séparées les unes des autres, peu visibles.
Une érythrodermie ne doit pas être confondue avec un érythème. En effet l’érythrodermie, beaucoup plus diffuse est associée à des signes généraux, à des troubles de thermorégulation et des adénopathies périphériques.
La conduite à tenir face à une éruption cutanée doit être différente selon l’âge.
A) Chez l’Enfant
Les principales étiologies seront les origines virales, avec comme argument un contexte épidémique, une notion de comptage, une fièvre, un syndrome pseudo-grippal, un énanthème et la présence d’adénopathie.
La démarche diagnostique devant ces érythèmes généralisés de l’enfant doit être méthodique.
1. Sémiologie bien spécifique, pouvant porter un diagnostic clinique fiable : mégalérythème épidémique, rougeole, rubéole, scarlatine.
2. Eruptions probablement d’origine virale, rassurante sur l’aspect clinique, dont la sémiologie ne permet pas de porter un diagnostic , adénovirus, échovirus, virus Lambda , traitées symptomatiquement sans faire de sérologie, en rassurant les parents et en les revoyant s’il y a persistance de la symptomatologie .
3. Rechercher des critères de gravité devant une éruption fébrile de l’enfant : maladie de Kawasaki, syndrome du choc toxique nécessitant une hospitalisation pour une prise en charge adaptée.
B) Chez l’Adulte
Devant une éruption généralisée, il faudra bien sur en premier lieu éliminer une toxidermie. En général, l’exanthème est prurigineux. A l’interrogatoire on retrouve une imputabilité médicamenteuse, avec des critères chronologiques bien spécifiques. L’arrêt du traitement doit améliorer la symptomatologie.
Certains critères de gravité sont importants à rechercher, face à cette toxidermie nécessitant l’hospitalisation.
Une étendue des lésions , plus de 60% de la surface corporelle, l’atteinte des muqueuses et un signe de Nikolski positif, faisant craindre une nécrolyse épidermique toxique ou syndrome de Lyell , la fièvre, des adénopathies et un œdème du visage, faisant craindre un syndrome d’hypersensibilité ou Dress syndrome. Sur le plan biologique, la présence d’une forte hyperéosinophilie, d’une cytolyse hépatique et d’une insuffisance rénale font craindre également une gravité de la toxidermie, avec le risque de syndrome d’hypersensibilité.
Chez l’adulte, l’autre diagnostic à ne pas manquer devant une éruption cutanée sont les éruptions liées aux infections sexuellement transmissibles. La Syphilis secondaire qui est une grande simulatrice et qui peut se présenter sous forme soit d’une roséole, soit de lésions érythémato-squameuses cuivrées qu’on appelle Syphilide. La primo infection VIH, avec un exanthème maculeux associé à des ulcérations des muqueuses. Dans ce cas là, la prescription d’examens complémentaires est de mise, TPHA VDRL, VIH1, VIH2.
En conclusion
Si l’éruption cutanée est un motif fréquent de consultation en médecine générale, elle va régresser facilement avec une bonne prise en charge.
Le médecin de famille doit reconnaitre les signes de gravité nécessitant surveillance et hospitalisation.