La maladie coeliaque

 

Docteur Jean-François CLAERBOUT

Gastro-entérologue

23 bis place Sébastopol

59000 Lille

 

          La maladie cœliaque (MC) est une malabsorption liée à une atrophie des villosités intestinales. Cette maladie de l’intestin grêle se manifeste lors de l’ingestion de gluten, et se répare complètement dès lors qu’un régime dépourvu de gluten est mis en place et maintenu.

 

               Le gluten est un complexe moléculaire essentiellement protidique, contenu dans 4 céréales : le blé, l’orge ou malt, le seigle et l’avoine.

 

               Son ingestion est toxique chez un sujet génétiquement prédisposé. Il faut des facteurs génétiques particuliers pour que ce gluten soit alors pris en charge par les lymphocytes, se lie avec une protéine : la transglutaminase, induisant une réaction immunitaire avec production d’anticorps et une toxicité directe sur le grêle dont la conséquence est l’atrophie des villosités intestinales.

               La prédisposition génétique peut être apportée par la recherche des groupes HLA-DQ2 et DQ8, présents dans 30 % dans une population  normale, et 95% de cœliaques.

 

               L’éviction du gluten de l’alimentation évite cette réaction immunitaire et répare la hauteur des villosités.

               La maladie cœliaque est donc un modèle particulier de maladie auto-immune ne se manifestant qu’en présence de gluten.

 

              

               Sa fréquence est manifestement sous-estimée. Des travaux américains et finlandais publiés en 2003 font état d’une prévalence de 1,5 % à 2,7%.

               L’incidence serait de 1/100 à 1/3000 dans la population mondiale.
               Une étude récente dirigée par Amouyel, sur 1163 prélèvements sanguins d’une population tirée au sort dans la Communauté Urbaine de Lille, a mis en évidence 70 personnes porteuses d’anticorps. La moitié d’entre eux a accepté la fibroscopie avec biopsie. 3 avaient une atrophie villositaire, 2 étaient douteux. La fréquence est donc estimée à 1/388.

               Une extrapolation à l’ensemble de la France laisse supposer que 200 000 adultes seraient atteints de la MC, la plupart d’entre eux ayant des symptômes atypiques ou réduits au minimum. On peut envisager qu’avec les anticorps anti transglutaminase, dont la sensibilité est plus importante, que ce nombre de 200 000 est encore sous-estimé, et qu’en France 80 % des patients ne sont pas diagnostiqués et donc non suivis ni traités.

 

               La MC se manifeste, dans seulement 20 % des cas, par un tableau de malabsorption caractéristique alliant la triade diarrhée, stéatorrhée, amaigrissement, à des signes de carence : anémie ferriprive, ou macrocytaire par déficit en B12 ; ostéopénie par déficit en calcium et vitamine D responsable de douleurs ostéo-articulaires ; manifestations neuromusculaires par déficit en vitamines B ; génitales : troubles de puberté, aménorrhée, stérilité ou avortements ; cutanées : alopécie, aphtose…

 

               La MC s’associe fréquemment à des maladies auto-immunes : diabète de type 1, dermatite herpétiforme, thyroïdite, hépatite auto-immune, psoriasis, vitiligo, cardiomyopathie primitive…dont certaines peuvent régresser sous régime sans gluten (RSG).

 

               L’évolution est émaillée de complications liées à la malabsorption elle-même et aux conséquences des différentes carences observées.

               Un régime incomplètement  ou mal suivi amène à un risque de lymphome du grêle de type T. Il se manifestera par des douleurs abdominales, une altération inexpliquée de l’état général, une occlusion du grêle.

               D’autres cancers, notamment ORL, de l’œsophage, du sein, du testicule sont significativement plus fréquents en l’absence de RSG.

               Ces complications expliquent une surmortalité de 10,7, ramenée à 2,0 si le RSG est correctement suivi.

 

               Le diagnostic de MC est histologique : mise en évidence d’une atrophie villositaire totale ou partielle par biopsies duodénales au cours d’une endoscopie. L’aspect macroscopique est parfois évocateur, et la vidéo capsule endoscopique du grêle peut découvrir des aspects significatifs. Mais les biopsies sont indispensables au diagnostic, permettant de mesurer la hauteur des villosités et d’observer la richesse des lymphocytes intra épithéliaux. La classification de Marsh est alors appliquée.

 

               L’approche biologique se fonde sur la mise en évidence dans le sérum d’anticorps anti-transglutaminase (remboursé SS depuis le 25 novembre 2008) et anti-endomysium. Ces anticorps sont corrélés au degré de l’atrophie.

               Ils se négativent (parfois tardivement : 2 ans) sous RSG strict. La réintégration du gluten dans l’alimentation les voit réapparaître.

               Les anticorps anti gliadine, moins sensibles et moins spécifiques, sont devenus obsolètes. Leur recherche n’est d’ailleurs plus remboursée.

 

               La recherche des anticorps permet l’identification des patients justifiant d’une fibroscopie avec biopsies, le dépistage des sujets à risque, la surveillance de la compliance au RSG.

 

               Le dépistage s’adresse aux apparentés au premier degré de porteurs de MC (la prévalence serait de 10 %), aux patients porteurs d’autres maladies auto-immunes, aux sujets considérés comme porteurs de colopathie fonctionnelle, aux patients présentant des signes dissociés de carences : anémie, déminéralisation osseuse, problèmes gynécologiques, signes cutanés, cytolyse hépatique, aphtose buccale….

 

              

               Le traitement de la MC n’est pas médicamenteux. Il repose sur l’exclusion complète et définitive du gluten contenu dans les 4 céréales : blé, orge, seigle, avoine, et cela même dans les formes silencieuses et atypiques.

               Ceci amène à supprimer le pain, les pâtisseries, les aliments incluant la farine issue de ces céréales, les pâtes, les plats cuisinés industriels, sauces, glaces, chocolat, charcuteries, desserts, bière.

               Le gluten se trouve dans l’amidon, les substances amylacées, les hosties, les excipients de certains médicaments, de nombreux additifs de l’industrie agro-alimentaire …d’où la nécessité de bien lire les étiquettes. Une directive européenne de 2003 oblige d’indiquer la présence ou les traces de gluten dans chaque conditionnement.

 

               Les repas doivent être préparés « à la maison » à partir d’aliments élémentaires.

Les aliments autorisés sont : le lait, le beurre, les œufs, les viandes  fraîches ou surgelées, les poissons et crustacés, les pommes de terre, les légumes frais ou surgelés, le riz, le maïs, le soja, le miel, le cacao. Les boissons autorisées : l’eau, les jus de fruits naturels, le vin et les alcools distillés. 

 

               Des produits de substitution sans gluten : farine, biscuits, produits chocolatés, pâtes sans gluten, sont en vente dans certaines épiceries ou par correspondance. L’article L165-1 du code de la SS, modifié par l’arrêté du 25 mars 2004 transcrit au JO du 1er avril 2004, accorde un remboursement Tips sur facture de 45,73 € par mois de ces aliments et produits de substitution pour un adulte, et 33,54 €  pour un enfant.

 

               La MC est la seule situation clinique dont le traitement repose sur une prescription diététique simple à expliquer, mais difficile à mettre en œuvre et à suivre.

 

               Un RSG correctement suivi amène une réponse clinique en quelques jours à 6 mois, biologique entre 6 et 12 mois, et histologique en 1 an.

               Cette correction des paramètres impose de ne mettre en œuvre un RSG qu’après certitude histologique : pas de traitement d’épreuve !!

               L’impact du régime est majeur sur l’amélioration des symptômes de malabsorption et sur la prévention des complications néoplasiques.

 

               Les difficultés apparaissent  en cas de déplacement, d’invitation, de repas pris à l’extérieur chez des amis ou au restaurant.

               La qualité de vie s’en ressent en raison des contraintes alimentaires : perte de convivialité parfois assimilée à une exclusion sociale, frustration, différences, injustice, lassitude du RSG, surcoût  lié aux produits de substitution.

               Il appartient au médecin d’informer, d’éduquer, d’accompagner, de convaincre et de motiver les cœliaques et leurs familles sur la nécessité et la rigueur du RSG.

 

               L’adhésion à l’AFDIAG (Association Française Des Intolérants au Gluten) doit être encouragée, afin de permettre au patient de mieux connaître sa maladie, de bénéficier de conseils diététiques, de participer à des rencontres et colloques, et de recevoir les mises à jour régulières sur les aliments et les médicaments interdits et autorisés.

 

               A F D I A G : 15 rue de Hauteville 75010 PARIS

                                     Tél : 01 56 08 08 22

                                     Fax : 01 56 08 08 42

                                     E-mail : afdiag@yahoo.fr

                                     Site internet : www.afdiag.org

 

               Déléguées régionales pour le Nord : Mme MC DUBOIS

                                                                                  afdiag59@laposte.net

                                                                                  03 20 06 55 73

                                                                                  06 88 37 19 73

                                                  pour le Pas de Calais : Mme Véronique LANDIVY

                                                                                  vero.afdiag62@sfr.fr

                                                                                  03 21 48 25 73

 

 

Pour en savoir plus :

 

               www.maladiecoeliaque.com

               www.afdiag.org

               www.has-sante.fr/portail/jcms/c_493810/recherche-dautoanticorps

               www.ibs-corata.org/medias/direct/paris9.pdf

 

 

DEMANDE DE PRISE EN CHARGE

La demande de prise en charge pour le remboursement de produits sans gluten doit être faite par le médecin référent. Tout malade cœliaque peut prétendre à un remboursement partiel de ses produits sans gluten dans la mesure où l’analyse des biopsies prélevées sur la paroi de l’intestin grêle montre une atrophie villositaire.

Le médecin doit remplir un « Protocole de soins » Cerfa n° 11626*03 pour prise en charge en Affection Longue Durée (ALD) non exonérante art. L 324-1 (65 %).

Joindre une ordonnance de prescription de « produits sans gluten » pour 6 mois à 1 an.

Après accord, la CPAM adresse au patient les imprimés Cerfa n° 10465°*01 « ALIMENTS SANS GLUTEN » et les attestations sur l’honneur.

 

DEMANDE DE REMBOURSEMENTS

Sur l’ordonnance, prescrite pour 6 mois à 1 an (faire des photocopies pour les envois mensuels), le médecin doit juste inscrire: « Pour une maladie cœliaque, le patient doit consommer de la farine, du pain, des pâtes et des gâteaux sans gluten pour une durée de 6 mois (ou 1 an) ».

Ne pas préciser de quantités ni de marques.

L’envoi de demande de remboursement ne doit se faire qu’une fois par mois. Le malade cœliaque doit avancer le montant des produits et se faire rembourser après l’achat (pas de possibilité de délégations pharmaceutiques, ni de Couverture Maladie Universelle).

Le patient doit envoyer à la caisse :

- 1° / L’imprimé CERFA 10465*01 « ALIMENTS SANS GLUTEN » vignettes         

- 2° / L’attestation sur l’honneur du paiement mensuel du montant des achats.

- 3° / La facture mensuelle des achats.

- 4° / L’ordonnance (photocopie) de prescription des produits sans gluten.

 

PRISE EN CHARGE

La maladie cœliaque ne fait pas partie des maladies ouvrant droit à une prise en charge à 100 % au titre de l’ALD «Sur Liste» (SL), mais certains médecins de caisses de Sécurité Sociale acceptent la prise en charge de la MC au titre de l’ALD «Hors Liste» (HL) en cas de complications ou de pathologies associées dues à la MC.

La prise en charge à 100 % HL n’est pas obligatoire; si elle est refusée, la prise en charge à 65 % doit être automatiquement acceptée.

Ce type de remboursement (produits délivrés en dehors du circuit pharmaceutique classique) est unique à la maladie cœliaque et n’est pas toujours très bien compris par les caisses.