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Troubles du métabolisme phospho-calcique

 

Docteur Catherine Cardot-Bauters

Clinique Marc Linquette

CHRU

Rue du Professeur Laguesse

59037 Lille Cedex

 

 

La régulation de la calcémie repose sur la PTH, la 1.25 hydroxylase et le récepteur sensible au calcium

 

Les ions calcium agissent :

-      Au niveau intracellulaire en tant que second messager, cofacteur de nombreux systèmes enzymatiques, dans la mobilité intracellulaire, la contraction musculaire, les sécrétions hormonales, la différenciation cellulaire.

-      Au niveau extracellulaire dans la minéralisation et la rigidité du squelette, l’hémostase et la conduction nerveuse.

 

La régulation de l’homéostasie calcique extracellulaire repose sur la PTH, la 1.25 di-hydroxylase et un récepteur transmembranaire, le CaSR (Calcium Sensing Receptor)

 

Quels sont les signes cliniques évocateurs d’hypocalcémie ou d’hypercalcémie ?

 

Les manifestations cliniques d’hypocalcémie ou d’hypercalcémie sont peu spécifiques. La sévérité des signes dépend de la rapidité de la variation de la calcémie. Ainsi une hypocalcémie chronique ou une hypercalcémie chronique peuvent elles être bien tolérées.

Hypocalcémie :

§  Signes d’hyperexcitabilité neuromusculaire : paresthésies distales et péribuccales …. crise de tétanie.

§  Signes d’hypocalcémie chronique :

Douleurs musculaires

Troubles des phanères

Cataracte

Calcifications des noyaux gris centraux et des tissus mous

Déminéralisation du squelette

Signes neuro-psychiques

Signes ECG : allongement du QT

 

Hypercalcémie :

§  Asthénie et faiblesse musculaire

§  Polyurie-polydipisie

§  Lithiase rénale

§  Troubles digestifs : anorexie, nausées, vomissements, constipation

§  Signes neuro-psychiques : apathie, somnolence, altération de la conscience

§  Signes cardiovasculaires : HTA, raccourcissement du QT

 

 

 

Comment interpréter le dosage de la calcémie ?

 

Quelque soit l’âge, la calcémie totale est stable : 2.38 + 0.08 mmol/l ou 95.5 + 3.5 mg/l.

L’hypocalcémie est définie par une valeur inférieure à 2.10 mmol/l ou 84 mg/l.

L’hypercalcémie se définit par une valeur supérieure à 2.63 mmol/l ou 105 mg/l.

Le calcium ionisé représente la fraction libre du calcium, non lié aux protéines, biologiquement actif.

Le dosage de la calcémie ionisée est possible mais non réalisé en pratique courante.

Pour interpréter correctement une valeur de calcémie totale, il faut la confronter à la protidémie ou à l’albuminémie.

L’hypoprotidémie ou l’hypoalbuminémie minore la valeur de la calcémie totale.

L’hyperprotidémie ou l’hyperalbuminémie majore la valeur de la calcémie totale.

 

Différentes formules permettent de calculer la calcémie corrigée par rapport à la protidémie ou à l’albuminémie :

Calcémie corrigée = calcémie totale (mg/l) - 0.689 x protidémie (g/l) + 50.6

Calcémie corrigée = calcémie totale (mg/l) – 0.989 x albuminémie (g/l) + 40

Calcémie corrigée = calcémie totale (mmol/l) – 0.0172 x protidémie (g/l) + 1.26

Calcémie corrigée = calcémie totale (mmol/l) – 0.02 x (albuminémie (g/l) + 1 - 40)

 

En pratique :

Calcémie corrigée = calcémie totale (mg/l) – (protidémie (g/l) – 70)

Calcémie corrigée = calcémie totale (mg/l) – (albuminémie (g /l) - 40)

 

Cette correction est cependant peu fiable dans les situations d’état critique (réanimation).

 

 

Quelles sont les étiologies des hypocalcémies ?

 

1. Carences en vitamine D :

 

  • Carences d’apport

Carence d’apport alimentaire (adolescent, personne âgée)

Défaut de synthèse endogène par manque d’ensoleillement (personne âgée)

Malabsorption intestinale (rachitisme, ostéomalacie)

 

  • Défaut de la 1αhydroxylase (insuffisance rénale chronique, hypoparathyroïdie) ou de la 25 hydroxylase (cirrhose).

 

  • Résistance à l’action de la vitamine D (mutation du récepteur de la vitamine D)

 

2. Hypoparathyroïdies :

 

  • Hypoparathyroïdies acquises :

Post-chirurgicales, après thyroïdectomie, par dévascularisation des parathyroïdes au cours de la chirurgie thyroïdienne, transitoire ou définitive si supérieure à 6 mois.

Auto-immunes : hypoparathyroïdie isolée ou polyendocrinopathie de type 1

Infiltration (maladie de Wilson, hémochromatose, amylose) ou lyse parathyroïdienne (iode 131, chimiothérapie, métastase)

 

  • Hypoparathyroïdies familiales et congénitales

 

  • Hypoparathyroïdies par carence en magnésium :

Une hypomagnésémie sévère (< 10 mg/l ou 0.40 mmol/l) entraine une altération de la sécrétion de PTH et diminue son action (alcoolisme chronique, malabsorption digestive, nutrition parentérale prolongée sans supplémentation en magnésium).

Le traitement vitamino-calcique est inefficace.

La correction de l’hypomagnésémie normalise la calcémie.

 

 

3. Pseudo-hypoparathyroïdies

 

4. Autres étiologies :

 

  • Pancréatite aiguë
  • Choc septique
  • Métastases osseuses ostéoblastiques des cancers de prostate ou du sein
  • Rhabdomyolyse
  • Insuffisance rénale chronique
  • Certaines thérapeutiques :

Antiépileptiques (barbituriques, hydantoïne), antiacides, kétoconazole, biphosphonates, calcitonine, laxatifs, chimiothérapie.

 

 

Quels traitements pour les états d’hypocalcémie chronique ?

 

Vitamine D : toujours

Supplémentation calcique : parfois

La supplémentation orale en calcium est théoriquement inutile si les apports calciques alimentaires sont suffisants.

Elle est cependant proposée au début de la prise en charge, tant que le pool calcique n’a pas été reconstitué.

Chez l’adulte 1000 à 2000 mg par jour de calcium élément.

Chez l’enfant 500 à 1000 mg par jour de calcium élément ou 40 à 60 mg/kg/jour.

A distance des repas.

 

Chez les patients carencés en vitamine D, la supplémentation vitaminique est rapidement efficace et repose sur la vitamine D2, la vitamine D3 ou la 25 OH D3 (Dédrogyl®).

Les dérivés 1α hydroxylés, alfacalcidiol (Un Alpha®) et calcitriol (Rocaltrol®), sont réservés aux états d’hypocalcémie chronique résultant d’un défaut de production rénale de 1.25 dihydroxycholécalciférol (hypoparathyroïdies et pseudohypoparathyroïdies).

La surveillance biologique repose sur le dosage de la calcémie, mais aussi de la calciurie. Une hypercalciurie chronique peut être responsable de lithiases et de néphrocalcinose. Un suivi  ASP et/ou échographique rénal est recommandé.

Attention si introduction d’un traitement diurétique qui peut déséquilibrer le traitement et entrainer une hypercalcémie.

Quelles sont les étiologies des hypercalcémies ?

  1. Hyperparathyroïdie primaire :

L’hyperparathyroïdie primaire est la première cause d’hypercalcémie chronique, en dehors d’un contexte néoplasique. Le diagnostic peut être évoqué devant différents signes cliniques (formes lithiasiques, formes osseuses …) mais le plus souvent l’hyperparathyroïdie primaire est asymptomatique et découverte fortuitement par un dosage de la calcémie fait pour une autre raison. Le diagnostic positif doit être affirmé par la biologie. Les examens de localisation (échographie, scintigraphie, scanner) ne sont réalisés que secondairement, selon des indications précises, une fois le diagnostic biologique posé avec certitude. Le traitement est en priorité chirurgical. Dans certains cas, si l’hyperparathyroïdie est asymptomatique, elle peut bénéficier de la surveillance. Les agonistes du récepteur du calcium peuvent également être prescrits dans certaines situations spécifiques.

Une hyperparathyroïdie primaire doit être recherchée :

-      en cas de lithiases rénales, particulièrement chez le sujet jeune

-      dans le bilan étiologique d’une ostéoporose

  1. Hypercalcémies des cancers :

Le contexte néoplasique est le plus souvent connu. L’hypercalcémie peut relever soit de lésions osseuses métastatiques, soit de la sécrétion tumorale d’un facteur hypercalcémiant, le plus souvent PTHrP (hypercalcémie humorale maligne).

  1. Hypercalcémies iatrogènes :

Surdosage en vitamine D lors des traitements prolongés et non surveillés.

Intoxication par la vitamine A.

Thiazidiques.

Lithium.

 

  1. Endocrinopathies

Hyperthyroïdie (phéochromocytome, insuffisance surrénale aiguë)

  1. Maladies granulomateuses

Sarcoïdose, tuberculose…

  1. Immobilisation prolongée

Pour des pathologies neurologiques ou orthopédiques, chez l’enfant, l’adolescent ou l’adulte jeune.

  1. Hypercalcémie familiale hypocalciurique

Affection autosomique dominante, liée à une mutation inactivatrice du récepteur sensible au calcium.

 

A l’exception des états d’hypercalcémie aiguë, le traitement de l’hypercalcémie est avant tout le traitement de l’étiologie.