Le NASH

De la stéatose à la cirrhose : gare aux sodas !
Dr Jean Eric Laberenne

Stéatose et stéatohépatite non alcoolique :
Une stéatose est une accumulation excessive de graisse dans le foie. Les causes en sont variées (tableau 1).
La stéatose hépatique représente la première cause d’hépatopathie chronique, touchant 15 à 30% de la population occidentale selon les études (1,2). Il faut distinguer 2 situations :
-la stéatose hépatique simple, où l’accumulation intrahépatique de graisse reste isolée et n’évoluera vers aucune complication,
-la stéatohépatite non alcoolique (Non Alcoolique Stéato-Hépatite ou NASH), où l’accumulation de graisse s’accompagne d’une réaction inflammatoire histologique intrahépatique. Cette inflammation peut évoluer vers la cirrhose et ses complications : insuffisance hépatique, hypertension portale et carcinome hépatocellulaire (CHC). Ainsi, 20% des NASH évolueront vers la cirrhose (3), et 10% de ces cirrhoses développeront un CHC (4). La NASH pourrait concerner 1% des français. Le CHC sur NASH est devenu la 2ème cause de transplantation pour CHC aux Etats-Unis (5).

Quelle population cibler ?
    La NASH peut être considérée comme  la manifestation hépatique du syndrome métabolique et doit donc être recherchée en cas d’obésité, de diabète de type 2 et de dyslipidémie. S’il n’existe pas de recommandation pour un dépistage systématique, une NASH doit néanmoins être recherchée devant toute perturbation inexpliquée du bilan biologique hépatique (surtout une cytolyse), et devant tout aspect stéatosique radiologique.

Comment confirmer le diagnostic de NASH ?
    Une discrète cytolyse (entre 1,5 et 4 N) peut être évocatrice, mais il n’existe pas de critère biologique spécifique. Une biologie hépatique normale n’élimine pas le diagnostic, puisque 20% des NASH s’accompagnent d’un taux de transaminases normal (6,7). L’interrogatoire doit éliminer toute consommation alcoolique imputable (2 consommations quotidiennes chez la femme, et 3 chez l’homme).
Des paramètres clinico-biologiques ont été proposés afin d’estimer la probabilité de NASH (tableau II). La présence d’au moins  2 des critères permet d’évoquer le diagnostic de NASH. Le Non-Alcoholic Fatty Liver Deasease Fibrosis Score (NAFLD) peut également être proposé (tableau III).
Plus récemment, s’est développée l’élastométrie impulsionnelle (Fibroscan), reposant sur la conduction des ultrasons au sein du parenchyme hépatique. Cette technique non invasive est validée dans le suivi des hépatites virales et devrait aider à une meilleure sélection des patients potentiellement atteints de NASH.
Cependant, seule l’histologie hépatique permet de confirmer ou non le diagnostic de NASH. Toute la stratégie de la prise en charge repose donc sur l’élimination des diagnostics différentiels, et  la sélection des patients justifiant une ponction biopsie hépatique (PBH).

Bibliographie
1 Corrado RL. Review of treatment options for noalcoholic fatty liver disease. Med Clin North Am 2014; 98 (1): 55-72
2 Vernon G. Systematic review : the epidemiology and natural history of non-alcoholic fatty liver disease and non-alcoholic steatohepatitis in adults. Aliment Pharmacol Ther 2011; 34 (3): 274-85
3 Matteoni CA. Nonalcoholic fatty liver disease: a spectrum of clinical and pathological severity. Gastroenterology 1999; 116 (6): 1413-9.
4Torres DM. Features, diagnosis, and treatment of noalcoholic fattyliver disease. Clin Gastroenterol Hepatol 2012; 10 (8): 837-58
5 Wong, Hepatology 2014
6 Yan E. Non-alcoholic fatty liver disease: pathogenesis, identification, progression, and management. Nutr Rev 2007; 65 (8): 376-84
7 Adams LA. Nonalcoholic fatty liver disease. CMAJ 2005; 172 (7): 899-905
8 Harrison SA. Orlistat for overweight subjects with noalcoholic steatohepatitis: A randomized, prospective trial. Hepatology 2009; 49 (1): 80-6
9 Promrat K. Randomized contrlled trial testing the effects of weight loss on noalcoholic steatohepatitis. Hepatology 2010; 5 (1): 121-9
10 Chalasani N. The diagnosis and management of non-alcoholic fatty liver disease : practice guideline by the American Gastroenterological Association. Gastroenterology 2012; 142 (7): 1592-609.

Quel bilan réaliser devant une suspicion de NASH ?

    La biologie doit comporter un bilan métabolique, la recherche d’une insuffisance hépatocellulaire biologique et la recherche de comorbidités hépatiques (tableau IV).

Quand réaliser une histologie hépatique ?

    Le risque iatrogène de cet examen invasif est aujourd’hui très limité. Néanmoins, son indication se limite aux situations de doute diagnostic. Cet examen n’a donc pas sa place en cas de complications déjà installées, comme des manifestations d’hypertension portale. Le but essentiel de la PBH est donc le diagnostic histologique de cirrhose compensée, ce qui justifierait alors d’un suivi hépatologique semestriel.

NASH : quel traitement ?

    Toutes les études convergent sur les bienfaits de la correction des règles hygiéno-diététiques : une perte de poids de 3% réduit la stéatose et de 10 % réduit l’inflammation (8,9). Une activité physique régulière (au moins 30 minutes, 2 fois par semaine) réduit également la stéatose (10). De plus, cette démarche sera bénéfique sur le risque cardio-vasculaire souvent associé.
Parmi les molécules proposées, seule la vitamine E peut garder un intérêt, mais dans des situations très restreintes.
La chirurgie bariatrique n’a pas sa place pour le traitement à lui seul de la stéatose.

NASH : quel suivi ?
    Si une cirrhose est constituée, le suivi doit être semestriel pour la clinique, la biologie (dont l’alfa-foetoprotéine) et l’imagerie hépatique. La gastroscopie sera alors proposée tous les 3 ans en l’absence de varices œsophagiennes et tous les ans en présence de varices.
En l’absence de cirrhose, le suivi sera semestriel à annuel pour la clinique, la biologie et l’imagerie hépatique. L’indication d’une histologie hépatique doit régulièrement être reconsidérée. Un contrôle histologique à 5 ans peut être discuté si une première histologie infirmait le diagnostic de cirrhose.





Bibliographie
1 Corrado RL. Review of treatment options for noalcoholic fatty liver disease. Med Clin North Am 2014; 98 (1): 55-72
2 Vernon G. Systematic review : the epidemiology and natural history of non-alcoholic fatty liver disease and non-alcoholic steatohepatitis in adults. Aliment Pharmacol Ther 2011; 34 (3): 274-85
3 Matteoni CA. Nonalcoholic fatty liver disease: a spectrum of clinical and pathological severity. Gastroenterology 1999; 116 (6): 1413-9.
4Torres DM. Features, diagnosis, and treatment of noalcoholic fattyliver disease. Clin Gastroenterol Hepatol 2012; 10 (8): 837-58
5 Wong, Hepatology 2014
6 Yan E. Non-alcoholic fatty liver disease: pathogenesis, identification, progression, and management. Nutr Rev 2007; 65 (8): 376-84
7 Adams LA. Nonalcoholic fatty liver disease. CMAJ 2005; 172 (7): 899-905
8 Harrison SA. Orlistat for overweight subjects with noalcoholic steatohepatitis: A randomized, prospective trial. Hepatology 2009; 49 (1): 80-6
9 Promrat K. Randomized contrlled trial testing the effects of weight loss on noalcoholic steatohepatitis. Hepatology 2010; 5 (1): 121-9
10 Chalasani N. The diagnosis and management of non-alcoholic fatty liver disease : practice guideline by the American Gastroenterological Association. Gastroenterology 2012; 142 (7): 1592-609.