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Stéatose hépatique non alcoolique


 

Docteur Catherine CHANDELIER

23 bis place Sebastopol, 59000 LILLE

 

 

 

LES POINTS CLES. CE QU’IL FAUT RETENIR

 

1.Prévalence en forte hausse. A rechercher chez les patients obèses et /ou diabétiques : cause la plus fréquente d’augmentation des transaminases en France.

 

2.Les stéatopathies métaboliques (St Métab) sont les manifestations hépatiques de l’obésité viscérale et du syndrome métabolique (synd. Métab). A rechercher quand il existe un Synd Métab.

 

3.Elles regroupent la stéatose simple  et la NASH. La NASH, souvent associée à une fibrose hépatique peut aboutir à une cirrhose et à un carcinome hépatocellulaire (CHC).

 

4.La pathogénie des St Métab serait liée au syndrome d’insulinorésistance (IR) des endocrinologues ou syndrome métabolique qui inclut des facteurs de risque cardiovasculaires.

 

5.Définition européenne du SYNDROME METABOLIQUE (ref 1)

                    

                  Obésité centrale appréciée par le tour de taille (H > 94 cm F > 80 cm)

                  

                   ET AU MOINS 2 des critères suivants :

                                    Glycémie         >5,6 mmol/l (1g/l ) ou diabète

                                    Triglycérides   >1,7mmol/l (1,48g/l) ou traitement (ttt)

                                    chol HDL        H<1mmol/l( 0,40g/l) F<1,3 mmol/l (0,50g/l) ou ttt

                                    TA                   >130/85 ou traitement

 

6.Rechercher des facteurs de comorbidité hépatique associés : alcool, virus, fer ++++++

 

7.Diagnostic des St Métab par ALAT, ASAT, GGT, échographie, marqueurs non invasifs de fibrose non validés encore par l’HAS  mais incontournables à l’avenir (fibroscan, fibrométre, fibrotest etc..) et biopsie hépatique parfois … !!

 

8.Traitement : régime (+/-chirurgie bariatique), exercice physique, traitements des comorbidités (hyperlipémie, diabète, HTA )

 Avenir ? (études parfois discordantes, autres en cours) : AUDC, vitE et surtout metformine, glitazones, orlistat, rimonabant …. ?

 

 

 

 

 

PROBLEME MAJEUR DE SANTE PUBLIQUE EN FRANCE (ref 2) dans les prochaines décennies

 

12,4 % obèses (IMC>30)    30% surpoids (IMC entre 25 et 30) (ref  3)

La prévalence est 2 fois moindre qu’aux USA 

Mais l’augmentation moyenne  annuelle est de 5,7% 

 

Cette pandémie d’obésité s’accompagne d’un syndrome métabolique et de stéatopathies métaboliques (St Métab).

Il est à craindre que ces St Métab ne deviennent la 1ere cause d’hépatopathies chroniques en France à l’avenir  avec l’amélioration considérable des résultats des traitements des hépatites virales.

 

Les St Métab sont déjà la 1ere cause d’anomalies chroniques du bilan hépatique en France.

 

Les St Métab regroupent la STEATOSE ET LA NASH

 

La fréquence de la STEATOSE dans la population générale est de 20% et celle de la NASH d’environ 3 % (données européennes)(ref 4).

 

« DU FOIE GRAS  A LA CIRRHOSE », DE LA STEATOSE AU CHC

 

On connaît mieux maintenant les répercussions cliniques des maladies hépatiques liées à une surcharge graisseuse non alcoolique, qui par le passé étaient sous estimées dans leur fréquence et gravité.

 

Les lésions vont de la simple stéatose (macrovacuolaire surtout à l’histologie) à la stéatohépatite non alcoolique (NASH) (ballonisation des hépatocytes, inflammation et corps de Mallory mimant l’atteinte liée à l’alcool )

 

La NASH, dont le diagnostic de certitude est histologique est souvent associée à une fibrose hépatique (30% environ) .

 

Les facteurs de risque d’évolution vers une fibrose sévère sont l’age > 50 ans, l’IMC>27 , un diabète, ASAT>ALAT, HTA, hypertriglycéridémie et bien sur les facteurs de co morbidité hépatique (alcool, VHC, VHB ) qu’il faut TOUJOURS rechercher.

Le rôle de la surcharge en fer est plus controversé.

 

Sans traitement, la fibrose hépatique s’aggrave chez environ 30% des malades (ref 5).

 

L’aggravation de la fibrose peut aboutir après quelques décennies à une cirrhose (une étude italienne a retrouvé 1% de cirrhose dans la population générale dont 25% de cause « inconnue », probablement plus de la moitié en rapport avec une NASH.)

Aux USA, il a été montré que le % de cirrhose de cause inconnue augmentait avec l’IMC

L’obésité, souvent associée à un diabète est établie comme une cause possible de cirrhose (ref 6).

 

Un carcinome hépatocellulaire sur cirrhose peut survenir ultérieurement.

De nombreuses études ont démontré que le risque de développer un CHC chez un sujet ayant une cirrhose est d’autant plus augmenté qu’il est obèse, surtout s’il est diabétique.

Il existe une relation positive et significative entre IMC et risque de décès par  cancer du foie (ref 7). Il faut par ailleurs savoir que l’incidence des CHC a doublé en 20 ans aux USA et que les prévisions en France sont également alarmantes.

 

 

STEATOPATHIES METABOLIQUES ET INSULINORESISTANCE-SYNDROME METABOLIQUE

 

Les St Métab sont intimement liées au syndrome d’insulinorésistance (IR) (diminution de la réponse des tissus à l’insuline) et à l’obésité viscérale ainsi qu’à une série d’anomalies clinico-biologiques groupées sous le terme de syndrome métabolique (Synd Métab)(définition européenne voir page 1 )

On insistera pour le clinicien sur la détermination du tour de taille qui fait partie intégrante de la définition.

 

C’est pourquoi il faut rechercher systématiquement une St Métab lors du diagnostic d’un Synd Métab.

Inversement, une St Métab, suspectée devant un foie hyper échogène à l’échographie et /ou des anomalies du bilan hépatique (ALAT, ASAT, GGT) doit faire rechercher un Synd Métab.

Des patients d’IMC normal mais avec une répartition androïde de la graisse abdominale peuvent avoir déjà une IR présente. On la recherche par le HOMA TEST (insulinémie à jeun U/ml  x  glycémie à jeun mmol/l /22,5), s’il est supérieur à 3 il existe une IR.

 

Quelle est la pathogénie des complications hépatiques de l’obésité ?

 

L’obésité viscérale est l’élément central. Le tissu adipeux est un véritable organe endocrine. Dans l’obésité viscérale, il existe une résistance à l’insuline avec libération d’acides gras (AG) libres qui affluent dans le foie. De plus, la stéatose hépatique pure peut aussi entraîner une insulinorésistance avec hyperinsulinisme réactionnel et synthèse de novo d’AG. Ceci entraîne un stress oxydatif, avec inflammation, nécrose et fibrose.

 

DIAGNOSTIC DES STEATOSES ET NASH

 

Clinique : IMC ET TOUR DE TAILLE

Clinicobiologique : recherche d’un syndrome métabolique (TA, glycémie, TG, chol HDL)

                                                  Ou d’une insulinorésistance débutante (HOMA TEST)

Biologique : ALAT, ASAT, GGT,

                     Si anomalies, compléter par sérologie VHC, VHB, bilan du fer

Echographie

Appréciation de la fibrose éventuelle hépatique :

    Les marqueurs sériques de fibrose (fibrotest, fibromax, fibrométre stéatose) ne sont pas encore validés par l’HAS. Cependant il est hautement probable que ces outils non invasifs permettront et permettent déjà d’améliorer la prise en charge de ces pathologies très fréquentes. Le problème du non-remboursement est également un obstacle dans une population assez souvent défavorisée.

    Le fibroscan, mesure de l’elastométrie impulsionnelle sera un outil sans doute intéressant sous réserve de la mise au point d’une sonde adaptée aux obèses.

    La ponction biopsie hépatique reste en théorie, à ce jour le seul examen permettant de faire le diagnostic de certitude (qui est histologique pour la NASH ). Ces indications doivent cependant en être pesées avec précaution en raison d’une morbidité documentée.

 

PRISE EN CHARGE ET TRAITEMENT

 

La prise en charge est multi disciplinaire : médecin généraliste, endocrinologue, hépatologue, nutritionniste.

 

TRAITEMENT DE L’HTA, DE L’HYPERLIPEMIE, DU DIABETE, SUPPRESSION DE L’ALCOOL.

 

REDUCTION PONDERALE PAR REGIME ET ACTIVITE PHYSIQUE (équivalent à 30 minutes de marche rapide par jour, apports lipidiques < 35%, manger des fibres, fruits et légumes ).

 

CHIRURGIE DE L’OBESITE : si IMC>40 ou >35 avec comorbidité. Le bénéfice de cette chirurgie a été récemment démontré (ref  8)

 

APPROCHE MEDICAMENTEUSE : (ref  9)

 

         1 Drogues permettant une perte de poids :

 

Orlistat : peu d’études

Rimonabant : études en cours  (antagoniste des récepteurs CB1 des cannabinoides). Intérêt potentiel (diminution de la graisse viscérale, effet anti fibrosant hépatique).

 

          2 Agents insulinosensibilisants :

 

Metformine : données discordantes ..

Thiazolidinesdiones (glitazones) : prometteur car en plus anti fibrosant

                                                      Mais peu d’études (pio et rosi glitazone) efficace pendant traitement sur la biologie et l’histologie MAIS à long terme ? ET  problème de prise de poids … !! ET effets cardio vasculaires négatifs de la rosi….

 

DONC PRUDENCE, ATTENDRE.AUCUNE RECOMMANDATION POUR L’INSTANT

 

ANTIOXYDANTS : actuellement, il n’est pas justifié de recommander vit E seule dans St Méta.

 

AUDC : hépatoprotecteur, mais effet non démontré.

 

A ce jour, en dehors des comorbidités, de la tentative de réduction de poids (régime, chirurgie), de l’activité physique, de la diminution de la consommation d’alcool (<30g H, < 20g F), on ne peut émettre de recommandations.

Il faudra attendre les résultats des études sur le rimonabant et les glitazones.

 

EN CONCLUSION :

 

Les stéatopathies métaboliques (stéatose et stéatohépatite NASH) sont un sujet majeur de santé publique avec la pandémie d’obésité.

Les conséquences hépatiques peuvent  conduire jusqu’au cancer du foie dont on s’attend à une explosion de l’incidence dans les années à venir.

Il est du rôle du médecin généraliste de dépister les sujets à risque que sont notamment les obèses, malades en surpoids et diabétiques en recherchant un syndrome métabolique, une insulino résistance et leurs complications hépatiques.

La prise en charge est multidisciplinaire et des molécules prometteuses comme les glitazones ou le rimonabant sont à l’étude.

La prévention passe par l’éducation des jeunes enfants et de leurs parents sur le plan diététique ainsi que la réaffirmation des bienfaits du sport pour la santé en général.  

 

 

BIBLIOGRAPHIE :

 

1 Alberti et a Diabet med 2006 ;23 ;469-480

2 Ratziu et al Hepatology 2006 ;44 ;802-805

3 Obepi INSERM/SOFRES ROCHE 2006

4 Bellentani et al Eur J Gastroenterol Hepatol 2004 ;16 ;1087-93

5 Ratziu et al ;J Hepatol 2005 ;42 ;12-4

6 Ratziu et al Ann.Endocrinol.2005 ;66 ;1s71-1s80

7 Calle et al N E J M 2003 ;348 ;162-38

8 Ratziu et al Gastroenterol Clin et Biol 2007 ;31 ;333-340

9 Anty et al Gastroenterol Clin et Biol 2007 ;31 ;1127-1134