Les tremblements



Dr Gilles RYCKEWAERT

 

 

A. Caractéristiques générales

 

  • Un tremblement correspond à des oscillations rythmiques involontaires de tout ou partie du corps autour de sa position d’équilibre.
  • La classification des tremblements s’établit en fonction des circonstances déclenchantes (à titre d’exemple pour les membres supérieurs) : le repos (mains relâchées et semi-fléchies reposant sur un plan, malade décontracté), le maintien d’attitude (manœuvre du serment, manœuvre du bretteur : index en opposition non joints), enfin le mouvement (manœuvre doigt-nez, talon-genoux, test du verre d’eau).
  • Sur le plan étiologique le tremblement de repos est caractéristique de la maladie de Parkinson, le tremblement postural et d’action évoque le diagnostic de tremblement essentiel, enfin le tremblement d’action et d’intention s’intègre dans le cadre des syndromes cérébelleux.
  • La localisation est variable en fonction de l’étiologie : le tremblement de la mâchoire est le plus souvent parkinsonien, le tremblement céphalique est essentiel, le tremblement cérébelleux affectera volontiers la racine des membres et le tronc.
  • Le tremblement disparaît pendant le sommeil et se majore à l’émotion.

 

B. Le tremblement de repos

 

·         Elément du syndrome parkinsonien, il constitue le mode le plus fréquent d’entrée dans la maladie de Parkinson s’associant ensuite à une akinésie (perte du ballant du bras, micrographie) et à une hypertonie.

·         Lorsque le tremblement présente l'ensemble de ces caractéristiques, il est quasi pathognomonique d’une maladie de Parkinson. Cependant il n’est pas indispensable au diagnostic (forme akinéto-rigide pure).

·         Dans la maladie de Parkinson, son début est unilatéral ou asymétrique le plus souvent à un membre supérieur (mouvement de flexion-extension des doigts, pronation-supination de la main et de l’avant bras) ou inférieur (flexion-extension du pied). Par la suite il peut s’observer aux lèvres, à la langue, à la houppe du menton. Il épargne toujours le chef.

·         Il apparaît au repos, disparaît au maintien d’attitude et lors du mouvement. Il est majoré par l’émotion, le calcul mental et le stress.

·         D’amplitude variable, il est régulier et de basse fréquence (4 à 6 hertz).

·         Un tremblement d’action ou de posture peut parfois s’observer dans le cours évolutif de la maladie.

·         Un tremblement de repos peut être présent dans d’autres syndromes parkinsoniens en particuliers iatrogènes.

·         L’efficacité des traitements anti-parkinsoniens sur le tremblement est variable. Les anticholinergiques agissent électivement sur ce symptôme. La L-Dopa et les agonistes dopaminergiques sont actifs mais nécessitent parfois des doses élevées. La stimulation électrique inhibitrice du noyau subthalamique abolit le tremblement parkinsonien controlatéral.

 

C. Le tremblement postural

 

  1. Tremblement essentiel

 

·      C’est la cause la plus fréquente de tremblement postural. Plus fréquent que la maladie de Parkinson, il comporte dans plus de la moitié des cas des antécédents familiaux en faveur d’une hérédité autosomique dominante à pénétrance variable.

·      Il survient préférentiellement chez le jeune adulte et le sujet âgé.

·      Présent dans la posture mais aussi dans l’action (écriture, manipulation d’un verre...), il affecte surtout les membres supérieurs de façon bilatérale mais parfois asymétrique. Il peut toucher le chef (tremblement de dénégation ou d’affirmation) et la voix (chevrotante), il est plus rare aux membres inférieurs.

·      Il est aggravé par l’émotion, le stress, l’exercice, la fatigue. Il peut s’atténuer ou disparaître transitoirement après la prise d’alcool.

·      Sa fréquence est rapide de 6 à 12 Hz, tend à diminuer avec l’âge alors que l’amplitude des oscillations augmente. L’évolution est lentement progressive mais, lorsqu’il devient intense, peut être une source de handicap fonctionnel et social majeur.

·      L’examen neurologique est, en dehors du tremblement, strictement normal (en particulier absence de syndrome akinéto-rigide associé).

·         Le traitement repose sur le Propranolol (Avlocardyl®), b-bloquant non cardio-sélectif (de 40 à 240 mg/jour). En cas de contre-indication, de mauvaise tolérance ou d’inefficacité, on aura recours à la Primidone (Mysoline®) (de 125 à 750 mg/j) ou à la gabapentine (1200 à 2400 mg/j). Certaines formes répondent au clonazépam (Rivotril®). La stimulation continue du noyau ventral intermédiaire du thalamus est parfois proposée dans les formes sévères résistantes au traitement médical.

 

2.      Autres causes de tremblement postural

 

·         Au cours de situations “ physiologiques ” particulières : peur, anxiété, exercice physique intense…

·         L'exagération du tremblement physiologique par une hyperthyroïdie, une hypoglycémie, un phéochromocytome.

·         Consommation excessive de tabac (acide nicotinique), de xanthines (café, thé, colas), sevrage en alcool.

·         Composante posturale du tremblement parkinsonien.

·         Origine médicamenteuse : prise de neuroleptiques, intoxication au lithium, dépakine, tricycliques, salbutamol ou au contraire sevrage en sédatifs (benzodiazépines).

·         La maladie de Wilson

 

D. Le tremblement d’action et d’intention

 

·         Il est de nature cérébelleuse par atteinte du cervelet ou des pédoncules cérébelleux supérieurs. Le tremblement s’accentue avec la vitesse du mouvement et à l’approche de la cible (tremblement intentionnel). Il n’apparaît pas au repos et au début du geste volontaire mais lorsque le geste se développe, que des ajustements positionnels fins sont requis (lorsque le verre d’eau atteint les lèvres, lorsque le doigt atteint le nez …). Il se révèle sous la forme d’une oscillation irrégulière d’amplitude croissante qui vient interrompre le mouvement. Il est parfois très ample qualifié alors de « dyskinésies volitionnelles d’attitude ».

·         Les gestes élaborés peuvent être extrêmement perturbés entraînant une incapacité majeure dans la vie quotidienne.

·         Il touche particulièrement la racine des membres supérieurs et le tronc : chez certains patients, il s’exprime par une oscillation rythmique de la tête sur le tronc voire du tronc lui-même.

·         Il est irrégulier et lent (2 à 4 Hz).

·         Il s’accompagne de signes caractéristiques d’un syndrome cérébelleux : hypermétrie, dyschronométrie, adiadococinésie.

·         Les causes les plus fréquentes sont la sclérose en plaques, les séquelles de traumatisme crânien, les atrophies cérébelleuses acquises ou héréditaires,  les lésions vasculaires ou toute autre lésion du cervelet et de ses voies de sorties.

·         Son traitement médical est limité. La stimulation thalamique peut constituer une solution mais elle est moins efficace que dans le tremblement essentiel ou parkinsonien.

 

E. Autres tremblements

·         Le tremblement spécifique de l’écriture.

·         Le tremblement orthostatique apparaît en position debout, il est détecté par la palpation des cuisses. Il peut occasionner des chutes. Il disparaît à la marche. Sa fréquence est de 16 Hz. Il est électivement sensible au clonazépam (Rivotril®).

·         Le tremblement hystérique peut mimer tous les tremblements organiques. Certains critères sont cependant très évocateurs : sa localisation à un seul membre et son caractère très spectaculaire. Lorsque le membre atteint est maintenu par l’examinateur, le tremblement peut migrer vers une autre partie du corps. Il persiste au repos comme à l’action et il est donc moins sensible que les tremblements organiques aux changements de posture. Enfin il s’atténue lors de la distraction et à la fatigue.

 

Références :

 

P. Jédinak. Les tremblements. Neurologies, février 2002, Vol 5.

 

D. DEVOS, L. DEFEBVRE.Le tremblement. Rubrique pratique FMC. Panorama du médecin, 2005, N°4966 : 35-39.

 

L. DEFEBVRE, M. VERIN. La maladie de Parkinson. Monographie de Neurologie. Editions Masson. Paris (2006).